Le 20 août 1940, Trotski est assassiné d’un coup de piolet dans le crâne à Mexico. Staline en a enfin fini avec son ennemi juré ! La haine de l’homme le plus puissant de l’URSS pour celui qu’il a exclu du Parti, puis exilé il y a déjà plus de vingt ans ne pouvait que s’assouvir dans la mort.
En 1907, les deux hommes assistaient tous les deux au congrès du Parti social-démocrate russe à Londres. Le fils du cordonnier géorgien est fasciné par les talents d’orateur de l’intellectuel juif : « Il a pour Trotski, c’est évident, une admiration qu’il aura du mal à cacher tout au long de sa vie », explique l’historien et politologue Alexandre Adler. De lui, il se différencie en tout : il est petit et vérolé, tandis que Trotski est grand. Celui-ci est né dans une famille bourgeoise, Staline a grandi dans la pauvreté auprès d’un père alcoolique et violent. « C’est le seul social-démocrate qui est issu du peuple », rappelle l’académicienne Hélène Carrère d’Encausse. Il se sent méprisé – avec raison – par l’intelligentsia socialiste et en conservera un complexe à vie.

Si Trotski, proche collaborateur de Lénine, pense et construit la révolution mondiale, Staline est employé à une mission plus pragmatique sur le terrain en Russie. « Il joue un rôle très important, précise l’historien Stéphane Courtois, parce qu’avec ses hold-up, son racket révolutionnaire, il ramasse l’argent qui va permettre à la fraction bolchevik en exil de survivre. » En 1917, après le renversement du tsar, Lénine devient le leader du premier régime communiste. Héros de la révolution, Trotski parcourt le pays pour mobiliser les hommes qui formeront l’Armée rouge. Staline est nommé secrétaire général du parti. En 1920, il se dresse sur la route de Trotski en faisant échouer sa tentative de rallier l’armée polonaise. La déclaration de guerre est signée entre les deux hommes.

En 1924, la mort de Lénine est une aubaine pour le Géorgien : « Staline, qui est moins brillant que les autres, est en même temps un remarquable stratège, explique Hélène Carrère d’Encausse. Il a une véritable stratégie de la formation d’un mythe de Lénine dans lequel il va se glisser. » Trotski, qui semblait désigné pour succéder naturellement au fondateur de l’Internationale communiste, est ainsi écarté au dernier moment par Staline.