Le taux de grévistes s’effrite au fil des semaines, mais la mobilisation sur la durée en fait l’un des conflits sociaux majeurs du rail depuis 1995.
Premier indicateur : le taux de gréviste à chaque journée d’action. Sur ce plan, il est indéniable que la mobilisation a sensiblement baissé depuis le 22 mars. Alors qu’on comptait autour de 30 % à 35 % de grévistes au début du mouvement, ce taux a reculé au fil du temps et s’est stabilisé autour de 14 % à 15 % début juin, avant d’atteindre 10 % jeudi 28 juin, pour le dernier jour de grève unitaire.
Deux précisions importantes tout de même : la mobilisation a assez bien résisté au mois de mai, le gros de la baisse ayant été observé en avril. Un sursaut notable a même été enregistré le lundi 14 mai pour la « journée sans cheminot et train » voulue par les syndicats (27,6 % de grévistes).
Les sept journées de mobilisation qui ont eu lieu un samedi, un dimanche ou un jour férié n’ont pas été retenues car elles ne sont pas comparables avec les jours « normaux ».
Derrière ces indicateurs généraux, on trouve toujours des situations différentes selon les catégories d’agents. Ainsi, environ la moitié des contrôleurs et conducteurs se mobilisent à chaque jour de protestation contre la réforme. Une proportion qui tombe à moins d’un quart chez les aiguilleurs, et autour de 2 % désormais chez les cadres.
Les sept journées de mobilisation qui ont eu lieu un samedi, un dimanche ou un jour férié n’ont pas été retenues car elles ne sont pas comparables avec les jours « normaux ».
Derrière les chiffres de mobilisation au jour le jour, comment situer le mouvement actuel dans l’histoire des grandes grèves à la SNCF ? Cette dernière compile sur son site des données sur les mouvements sociaux depuis 1947. Dans ces chiffres, on trouve notamment le nombre de journées de grève moyen par agent, ce qui permet de comparer des mobilisations à des époques différentes sans fausser le tableau par des différences d’effectifs importantes.
ENVIRON TROIS JOURS DE GRÈVE PAR AGENT DEPUIS LA FIN DE MARS
Contactée, la SNCF n’était pas en mesure de communiquer un décompte global des jours de grève accumulés depuis le 23 mars jusqu’au 1er juin selon la même méthodologie. Il nous a néanmoins été possible d’en faire une estimation indicative de la manière suivante :
En tenant compte de ces deux facteurs, on peut retenir un ordre de grandeur de trois journées « perdues » par agent environ (0,13 multiplié par 25 jours de grève) en moyenne depuis le 23 mars.
Suivant ce résultat, la mobilisation en cours serait ainsi déjà au moins comparable, si ce n’est supérieure à celle contre la loi El Khomri (loi travail) en 2016, où la SNCF avait comptabilisé 2,5 journées « perdues ». Elle serait également presque de l’ordre de la grève contre la réforme des retraites en 2010 (3,8 jours), qui étaient pourtant la plus suivie des vingt dernières années à la SNCF.
SOURCE : SNCF OPEN DATA (DIRECTION COHÉSION & RESSOURCES HUMAINES)
Cette estimation est, en revanche, encore loin, pour l’heure, de l’ampleur des mobilisations contre la réforme des retraites de 1995 (5,8 jours). Sans même parler de 1968, où les cheminots avaient fait chacun près de trois semaines de grève en moyenne. Rappelons encore une fois que ces chiffres ne reflètent pas forcément les perturbations du trafic, la grève de 2018 concernant largement les conducteurs, contrôleurs et aiguilleurs, quand d’autres mouvements pouvant être plus « répartis » au sein des effectifs de la SNCF.
Initialement publié le 1er juin 2018, cet article a été mis à jour avec les chiffres de la participation à la grève en date du 28 juin, dernier jour de grève unitaire.