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Gilles Perrault, un homme à part, est mort !

Gilles Perrault vient de nous quitter. C’était un homme et un écrivain engagé. Gilles s’est notamment fait connaître par son livre Le Pull-over rouge, en 1978, qui prenait la défense de Christian Ranucci, guillotiné pour un meurtre d’enfant après une enquête bâclée. Cet ouvrage lui avait valu des poursuites judiciaires. Auparavant, il avait publié de nombreux romans, notamment des polars, et aussi un recueil de nouvelles, Les Parachutistes, à partir de son expérience de la guerre d’Algérie dans ce corps. Il montrait comment des jeunes gens pouvaient être formatés au point de devenir des tueurs et des tortionnaires, comparant même les méthodes de dressage de l’armée française à celles des nazis.

Gilles Perrault devait par la suite publier de très nombreux livres que l’on peut considérer comme incontournables sur plusieurs sujets. Impossible de les citer tous. Parmi les plus significatifs, Notre Ami le roi, sur la dictature du tyran Hassan II et le colonialisme français au Maroc. L’Orchestre rouge et Taupes rouges contre SS, sur les réseaux d’espionnage formés par des militants communistes, au service de l’URSS, pendant la Seconde Guerre mondiale. Un Homme à part, sur la vie et l’assassinat du militant anticolonialiste Henri Curiel.

Gilles s’était rapproché de l’extrême gauche et avait rallié le mouvement antifasciste Ras l’front (RLF), avant de le quitter à la suite des calomnies délirantes de Didier Daeninckx qui l’accusait pêle-mêle d’être un complice des intégristes islamistes, un négationniste et… un pédophile refoulé dans un pamphlet aussi odieux que grotesque. Gilles Perrault déplorait que les militants antifascistes, sensibles à l’aura de Daeninckx, n’aient pas unanimement dénoncé ces calomnies.

Gilles Perrault n’hésitait pas à aller à contre-courant. On se souvient que, au cours d’une émission TV, il avait vigoureusement dénoncé la guerre du Golfe, appelant même les soldats à mettre les crosses en l’air et les travailleurs à refuser de transporter des armes, rappelant l’exemple des dockers qui avaient balancé dans le port de Marseille des camions d’armes en partance pour l’Indochine. Cette sortie exaltée lui avait valu d’être désormais boycotté par tous les grands médias. Ceux-ci lui ont fait payer le prix de son courage pendant le reste de sa carrière…


Gérard Delteil

L’auteur, qui s’est éteint à l’âge de 92 ans, était notamment connu pour « Le Pull-Over rouge », une enquête romancée sur l’affaire Ranucci.
Gilles Perrault est mort jeudi 3 août à son domicile de Sainte-Marie-du-Mont (Manche) à l’âge de 92 ans, a déclaré au Monde un proche parent de l’écrivain, confirmant une information de Ouest-France.
Jacques Peyroles, de son vrai nom, avait commencé une carrière d’avocat, avant de bifurquer vers le journalisme puis la littérature. Sous son pseudonyme, il signe notamment en 1969 un roman d’espionnage à succès, Le Dossier 51, adapté en film par Michel Deville.
Il n’était « pas seulement un formidable raconteur. Mais aussi un homme engagé », a salué jeudi soir le journaliste Edwy Plenel dans un message sur Twitter, rebaptisé X.
Le nom de cet ancien adhérent au parti communiste revient dans de nombreuses tribunes engagées contre le racisme, pour la légalisation de l’euthanasie, ou en 2007 en faveur de l’ex-militant italien Cesare Battisti.

« Plume de combat »
« Avec sa plume de combat, Gilles Perrault a permis d’avancer vers l’abolition de la peine de mort. L’humanisme a aussi guidé son engagement à Ras l’front », un réseau associatif actif dans les années 1990 pour lutter contre les idées du Front national, a souligné la ministre de la culture Rima Abdul Malak dans un message sur X.
En 1978, la parution du livre-enquête Le Pull-Over rouge, qui alimente les doutes sur la culpabilité de Christian Ranucci, guillotiné deux ans plus tôt pour le meurtre d’une petite fille, va donner lieu à une vive polémique, alimentant les pages des journaux pendant plus de trente ans. Des livres ultérieurs sur l’affaire, et ses propos répétés à son sujet (il avait qualifié l’enquête sur le meurtre de la petite Marie-Dolorès Rambla de « forfaiture »), conduiront à sa condamnation, notamment pour diffamation envers des policiers de la brigade criminelle de Marseille. La peine de mort est abolie en France en 1981, mais les trois demandes de révision du procès n’ont jamais abouti.
« Une recherche de révision, ça n’est pas du sprint, c’est du marathon », avait déclaré l’écrivain à l’Agence France-Presse (AFP) en 2006, espérant toujours voir un jour l’affaire réexaminée.
« Il est des auteurs et des œuvres qui savent susciter le débat, et parfois même des vocations. Si je devins avocate, c’est en partie grâce au Pull-Over rouge », a réagi jeudi la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet.

A l’origine d’une crise des relations franco-marocaines
En 1990, Gilles Perrault avait été à l’origine de l’une des plus graves crises de l’histoire des relations franco-marocaines en publiant le retentissant Notre ami le roi, qui faisait un bilan accablant de trente ans du règne d’Hassan II.
« Les livres de Gilles Perrault sont des marqueurs pour ma génération. Il y a un avant et un après Notre ami le roi dans le regard sur le Maroc d’Hassan II », a appuyé Pierre Haski, journaliste et président de Reporters sans frontières.
L’ouvrage s’interrogeait aussi sur la complaisance de certaines élites françaises à l’égard du monarque.
Gilles Perrault avait préfacé en 2014 un ouvrage très critique à l’égard du roi actuel du Maroc, fils d’Hassan II, écrit par un ancien journaliste marocain de l’AFP Omar Brouksy. Intitulé Mohammed VI derrière les masques, il était sous-titré « le fils de notre ami » en référence au livre de Gilles Perrault.

Le Monde avec AFP du 04 août 2023

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Cette entrée a été publiée le 6 août 2023 par dans DECES, FRANCE.