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FRANCE : Extrême droite : entre violences et manifestations, un week-end de racisme débridé.

par Maxime Macé et Pierre Plottu Liberation

publié le 27 novembre 2023 à 21h15

A Rennes, des dizaines de nervis défilant cagoulés, fumigènes en main et scandant des slogans nationalistes. A Paris, des néonazis, dont des fichés S, arrêtés alors qu’ils taguaient des croix gammées. Samedi soir à Romans-sur-Isère, cette tentative d’expédition punitive perpétrée par des professionnels du genre, et empêchée in extremis par la police. Sans oublier la dizaine de rassemblements aux mots d’ordre racistes, déjà organisés ou à venir, un peu partout en France ces jours-ci. Avec les violences commises par l’extrême droite le soir du match France-Maroc, en décembre 2022, la France redécouvrait la capacité de mobilisation de cette mouvance. Elle se confirme depuis ce week-end, sans susciter à ce stade beaucoup d’émoi politique hors de la gauche, et avec la bienveillance des médias d’extrême droite.

Depuis la mort du jeune Thomas Perotto, 16 ans, poignardé en marge d’un bal à Crépol (Drôme) dans la nuit du vendredi 18 au 19 novembre, groupuscules et influenceurs d’extrême droite, tout à leur fantasme d’une «guerre civile raciale»ont largement appelé à la vengeance. Un concert auxquels se sont jointes des figures politiques d’extrême droite et même de droite traditionnelle qui ont déroulé leurs amalgames racistes, suggérant que les immigrés ou les non-blancs dans leur ensemble seraient des «barbares» et des «ennemis».

Un message repris dans la rue par les militants. Premier acte le mercredi 22 avec une manifestation organisée à Lyon par les groupuscules identitaires et néofascistes locaux, connus pour leur violence. La préfecture du Rhône a décidé d’interdire le rassemblement. Pas de quoi calmer la mouvance qui, au fil des jours, multiplie les appels à des rassemblements similaires dans des villes comme Aix-en-Provence (relayé notamment par le sénateur zemmourien de Marseille, Stéphane Ravier), Toulouse ou Nantes (partagé par la section locale du Rassemblement national de la jeunesse) mais aussi Laval, Albi, Colmar ou Annecy.

Action «pacifique» à la barre de fer

«Halte à la barbarie», proclamait la banderole des radicaux menant la manifestation angevine. A Aix, ce sont les néofascistes de Tenesoun qui ont organisé les prises de parole. A Annecy, encadrés par la section locale de Génération Zemmour, les participants ont défilé derrière le slogan «ni bougie, ni pardon». Dans le cortège, cette pancarte : «Lola, Thomas on vous vengera» – le premier prénom fait référence à la jeune fille de 12 ans assassinée en octobre 2022 à Paris par une ressortissante algérienne.

Des mots qui appellent des actes. A Romans-sur-Isère, samedi soir, 80 militants néofascistes ont tenté d’entrer en force dans le quartier de la Monnaie, d’où sont originaires certains des suspects du meurtre de Thomas et dont ils assimilent les habitants à des «occupants» et des «ennemis», selon les mots tenus par un participant dans une vidéo relayée sur les réseaux d’extrême droite. Le même, visage masqué, évoque une action «pacifique» alors que, sur des images tournées au sein du groupe par l’un de ses membres, de nombreux militants portent des barres de fer. Le préfet de la Drôme Thierry Devimeux a déploré «la tentative d’intimidation menée par ces jeunes d’ultra-droite», précisant que les affrontements avec les forces de l’ordre avaient été «violents». Plusieurs policiers ont été blessés au cours de l’intervention, qui a empêché une action qui avait tout de la tentative d’expédition punitive visant des personnes d’origines maghrébines.

Au total, 20 participants présumés aux faits ont été interpellés dont 17 placés en garde à vue, détaille à Libé une source policière. Lundi, des peines de six à dix mois de prison ferme ont été prononcées contre six de ces militants, jugés en comparution immédiate à Valence notamment pour «violences sur policiers». Notre source note également la jeunesse des individus arrêtés, dont la moyenne d’âge est de tout juste 21 ans. Elle souligne aussi «la capacité de l’ultradroite à rassembler des personnes de toute la France : il n’y a aucun Drômois parmi les interpellés».

«Panoplie complète du petit nazi»

Des groupes violents bien connus ont pris part à l’équipée. Par exemple des Parisiens de la Division Martel (DM), un groupuscule néonazi lié au GUD et habitué de ce genre de faits. L’un d’eux a été attrapé par des habitants du quartier, qui l’ont ensuite interrogé et filmé avant de diffuser la vidéo sur les réseaux sociaux. Sur son téléphone apparaissent des chaînes Telegram (une application cryptée) comme «Adolf Hitler vous parle» ou «Ouest Casual», le principal canal de propagande de l’extrême droite violente. Mais aussi un fil de discussion consacré à cette descente. Et notamment ce message, alors que la soirée tournait au vinaigre pour les assaillants (l’un d’eux, copieusement frappé par des habitants, a été hospitalisé) : «Tournez pas bon sang. Tapez pas de bougnoules. Cachez-vous, ordre de gros lardon».

Ce pseudonyme serait, selon des sources antifascistes, celui d’un militant de la Division Martel, jeune homme arrêté suite à la descente avortée sur les Champs-Elysées le soir du match France-Maroc. La police avait trouvé chez lui «la panoplie complète du petit nazi», selon les mots des enquêteurs, y compris des brassards et drapeaux à croix gammée. Dans ce dossier, il a été relaxé le 8 septembre pour vice de procédure, comme les sept autres accusés. Des Bisontins du groupe Vandals Besak figurent également, a révélé StreetPress, parmi les interpellés de ce samedi. Certains de ses néonazis ont aussi participé à des violences le soir de France-Maroc, mais à Annecy. Elles ont valu à l’un de leurs membres, un ancien légionnaire, d’être incarcéré.

La Drôme n’est pas la seule à avoir vu défiler des nervis. Vendredi soir à Reims, quelque 50 militants ont marché dans le centre-ville derrière un drapeau noir frappé d’une croix celtique néofasciste. Dans le cortège, là encore, des slogans racistes, et même des bras tendus bien hauts. Les hooligans néonazis des MesOs Reims sont suspectés d’être à l’origine de cette action. A Rennes, dimanche soir, une trentaine de militants cagoulés ont lancé des slogans nationalistes en parcourant le centre-ville. D’autres rassemblements, toujours organisés par des groupuscules d’extrême droite, sont encore annoncés : à Lille mercredi, à Bordeaux jeudi, à Paris vendredi. En écho aux mobilisations de l’extrême droite espagnole ces dernières semaines sous le mot d’ordre «Noviembre Nacional», les réseaux français de la fachosphère espèrent lancer un «Novembre National».

En France, selon les services de renseignement, l’ultradroite (un terme policier) est forte de 3 000 membres, dont 1 500 potentiellement violents. On peut lui imputer, selon le décompte de Nicolas Lerner, patron de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), en juillet dernier, «dix actions terroristes, d’inspiration néonazie, raciste ou complotiste, déjouées depuis 2017 en France, avec des cibles aussi variées que des citoyens de confession musulmane ou juive, des élus ou des francs-maçons»«Depuis le printemps, nous assistons à une résurgence très préoccupante des actions violentes ou des intimidations» de la mouvance, pointait déjà le haut-fonctionnaire, soulignant leur volonté de «reprendre la rue».

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Cette entrée a été publiée le 28 novembre 2023 par dans ANTIFASCISME, ETAT POLICIER, FRANCE, NAZISME.