Tout le monde se souvient des images de la population fuyant le feu nucléaire à Hiroshima le 6 août 1945, à Nagasaki le 9 août 1945 et les conséquences de ces frappes sur la santé des Japonais jusqu’à nos jours.
A l’heure actuelle 122 pays ont signé le TIAN : Traité sur l’Interdiction des Armes Nucléaires entré en vigueur le 21 janvier 2021.

73 pays l’ont ratifié.
Aucun des 9 pays détenteurs de l’arme nucléaire n’a pour l’heure accepté de participer aux discussions et de le signer : Etats-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni, Pakistan, Israël et Corée du Nord
Dans ce sens un Appel mondial pour l’élimination des armes nucléaires a été lancé en janvier 2025 :
Où Le Mouvement de la Paix s’engage avec les citoyennes et citoyens de tous pays pour exiger de tous les Etats du monde qu’ils mettent réellement tout en œuvre pour réaliser l’élimination totale des armes nucléaires.
Ils exigent que toutes les ressources gaspillées pour ces armes soient utilisées pour le bien-être de l’humanité, pour la lutte contre le réchauffement climatique, pour la protection de notre planète commune et la construction d’un monde de paix basé sur la justice, la solidarité et la coopération.
Pendant trente ans, la France a fait exploser 193 ogives nucléaires au-dessus de Mururoa et Fangataufa, deux atolls du Pacifique situés à plus de 15 000 kilomètres de Paris. Des opérations dévastatrices pour l’environnement et pour la santé des Polynésien·nes
De 1966 à 1996, l’armée française a fait exploser 193 bombes atomiques en Polynésie, dont certaines avaient une puissance 120 fois supérieure à celle larguée sur Hiroshima. Aujourd’hui, seuls 40 % de ceux qui constituent un dossier d’indemnisation obtiennent une réparation, soit quelques centaines de personnes. En 2023, sur 564 nouvelles demandes d’indemnisation, 151 victimes ont pu être indemnisées, pour un montant total d’environ 12,2 millions d’euros. Pourtant, 12 000 Polynésiens ont travaillé sur les sites des essais.
C’est bien la population polynésienne qui a souffert du silence des autorités. Comme le 17 juillet 1974. Ce jour-là, les militaires tirent une bombe baptisée « Centaure », dont les retombées radioactives ont potentiellement contaminé 110 000 personnes sur l’archipel,
Leucémie, lymphome, cancers… Encore aujourd’hui, les conséquences des essais nucléaires de l’armée française marquent les Polynésien·nes jusque dans leur corps. Très peu, pourtant, ont obtenu réparation de l’État français : 97 % des demandes d’indemnisation présentées entre 2010 et 2017 ont été rejetées — 70 % en 2024. Pour en bénéficier, une victime doit démontrer qu’elle a reçu pendant un an une dose radioactive supérieure à 1 millisievert (mSv).
Or, ce seuil « n’a strictement aucune valeur scientifique », déplorent les parlementaires, qui veulent le remplacer par une « présomption d’exposition » aux radiations nucléaires. Le simple fait, pour une victime, de démontrer qu’elle était présente sur une île exposée à des retombées au moment d’un tir atmosphérique lui ouvrirait un droit à réparation.
Stand du comité local du Mouvement de la Paix, le mercredi 6 août 2025, Place de Loire à Orléans de14h30 à 18h00.
Peut-on encore rêver d’un monde sans armes nucléaires ? Quatre ans après l’entrée en vigueur du Traité de l’interdiction des armes nucléaires, ratifié en 2021 par cinquante pays, l’organisation japonaise Nihon Hidankyo qui regroupe les survivants des bombes A et H (Prix Nobel de la Paix 2024) est en visite en France pour rappeler les risques que font courir à l’humanité les armes atomiques.

Plus le temps passe, plus la mémoire s’efface. Ils ne sont plus très nombreux les hibakushas, comme on appelle en japonais les survivants des bombardements atomiques américains sur Hiroshima et Nagasaki.
« Le 9 août 1945, j’avais quatre ans. Nous étions une famille de six personnes et vivions à 5 km du point zéro », raconte Shigemitsu Tanaka, 84 ans, l’un des derniers témoins de l’enfer nucléaire. « J’étais en train de jouer avec mon petit frère et mon grand-père dans le jardin. J’ai à peine eu le temps de dire “Papi, j’entends un avion !” que le ciel de Nagasaki était éclairé par un flash blanc. Puis il y a une détonation, et le souffle de l’explosion. Abasourdi, j’ai couru vers ma mère en criant : “la bombe, sur la montagne!” Les vitres ont été brisées, les portes coulissantes arrachées. Le lendemain, ma mère est allée aider à transporter les irradiés dans l’école près de chez nous. Dans les salles de classes, des blessés de tout âge étaient allongés, la plupart étaient si gravement atteints qu’on ne pouvait pas distinguer s’ils étaient des hommes ou des femmes. Ils gémissaient… une puanteur étrange emplissait l’air ».
Ce petit homme chauve à lunettes, cheminot à la retraite est aujourd’hui vice-président de Nihon Hidankyo, qui cherche activement à sensibiliser les jeunes générations de Japonais pour que leur histoire ne sombre pas dans l’oubli, dans un pays qui depuis 2022 se remilitarise, et s’éloigne de plus en plus du pacifisme inscrit dans la Constitution japonaise après la seconde guerre mondiale. « Avec seulement deux bombes atomiques, les villes de Nagasaki et Hiroshima ont été transformées en un instant en un amas de ruines. Le rayonnement thermique atteignait plusieurs dizaines de milliers de degrés Celsius : les corps humains se sont évaporés, brûlés » rappelle Shigemitsu Tanaka. « Ensuite, les radiations radioactives ont déchiré les organismes de ceux qui étaient encore vivants ».

Sur les 650 000 personnes irradiées, 250 000 sont décédées avant la fin de l’année 1945, dont 40 000 enfants. Après une décennie de censure et de discriminations à l’encontre des Hibakushas, l’organisation japonaise, Nihon Hidankyo, est fondée en 1956 pour demander une indemnisation de la part de l’état japonais, responsable de l’attaque de Pearl Harbor, qui a conduit à l’entrée en guerre des États-Unis dans la Seconde Guerre mondiale.
Aujourd’hui, Shigemitsu Tanaka est très inquiet : « Il y a des conflits en Ukraine et au Moyen-Orient. La Russie et Israël possèdent des armes nucléaires et l’idée que les armes nucléaires ne devraient pas être utilisées, n’est plus aussi tabou. Certaines puissance nucléaires n’ont pas peur de menacer de l’utiliser ». Il mentionne en outre les progrès technologiques qui ont rendu les armes nucléaires plus petites, plus portables, plus sophistiquées. « La bombe de 1945 qui est tombée sur ma ville est un engin artisanal comparé aux armes nucléaires d’aujourd’hui ».
En visite en France, invité par le syndicat des travailleurs français CGT, les Hibakushas demandent à la France, quatrième puissance nucléaire mondiale, de s’engager au moins « moralement » pour un monde sans armes atomiques, en acceptant de siéger comme « observateur » à la prochaine assemblée du TIAN qui aura lieu en mars. Le TIAN, ce jeune Traité des Nations unies pour l’Interdiction des armes nucléaires, a été signé il y a quatre ans presque jour pour jour, par 93 pays, la plupart d’Afrique, d’Amérique du Sud et d’Asie. Mais aucun des pays couverts par le « parapluie américain » tels que le Japon, l’Allemagne ou les pays Baltes n’y participent. Encore moins, les neuf États détenteurs de l’arme nucléaire – dont la France – qui ont même refusé de prendre part aux négociations préalables de ce traité.
Les puissances nucléaires considèrent qu’il n’est pas « réaliste » d’envisager un monde sans armes nucléaires, et estiment que le TIAN sape la portée du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, en vigueur depuis 1970, et signé par quasi tous les pays du monde dans un effort de contrôler et réduire le stock d’armes atomiques.
Les commémorations du 6 et du 9 août n’ont qu’un seul but : rappeler l’impensable pour empêcher qu’il ne se reproduise. Visiter Hiroshima ou Nagasaki bouleverse quiconque se rend sur les lieux de mémoire.
Comment expliquer alors qu’Emmanuel Macron puisse, deux ans après avoir écrit sur le livre d’or du Musée de la paix d’Hiroshima ces mots de compassion empruntés à Albert Camus, que le « seul combat qui mérite d’être mené est la paix », et marteler dans son discours aux armées le 13 juillet dernier d’un ton martial que « pour être libre dans ce monde, il faut être craint. Pour être craint, il faut être puissant » ?
Beaucoup de dirigeants pensent que la puissance militaire suffirait à garantir la stabilité de leur nation. L’histoire a montré que cette illusion se termine souvent dans l’échec, à l’image de la France de 1940 qui croyait en sa ligne Maginot, synonyme de puissance militaire… La volonté du président Macron d’« européaniser » la dissuasion nucléaire française ne fait qu’envenimer les tensions et fragilise davantage le régime de non-prolifération.
220 000 personnes sont mortes atomisées, ensevelies ou brûlées, ou des suites des maladies radio-induites, entre le moment de l’impact des bombes atomiques les 6 et 9 août et la fin de l’année 1945. Nous avons connaissance de cette horreur grâce aux témoignages des survivants de ces journées, les Hibakusha.
Pour leur rendre hommage, ICAN France présente « Plus jamais Hiroshima & Nagasaki », une nouvelle exposition qui doit faire évoluer les consciences en expliquant les drames des destructions de ces deux villes japonaises à travers des témoignages. Elle apporte aux visiteurs des outils de compréhension sur les effets de ces armes en cas d’emploi, mettant en péril la société humaine qui entrera alors dans « un hiver nucléaire ». Elle interroge la théorie de la dissuasion et le principe du « parapluie nucléaire ». Enfin, cette exposition présente le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires et propose aux citoyen.nes des clés d’action pour agir en faveur d’un monde sans armes nucléaires.
ICAN France se tient aux côtés des 97 villes françaises et collectivités territoriales qui soutiennent le TIAN, ainsi qu’aux côtés de la prochaine grande ville qui le signera ce 6 août, et de tous ceux qui refusent la fatalité nucléaire.
Nous appelons les responsables politiques français à sortir de leur aveuglement : loin d’apporter la sécurité, la dissuasion nucléaire constitue une menace permanente. Il est temps pour eux d’agir pour préserver le Traité de non-prolifération ratifié par la France et de rejoindre la dynamique du TIAN. C’est ainsi que nous pourrons véritablement honorer la mémoire des victimes en œuvrant pour un monde sans armes nucléaires.
Citations
Publiée par une vingtaine d’organisations membres d’ICAN France, dans le journal Libération le 5 août 2025.L’idée portée par Emmanuel Macron d’européaniser la dissuasion nucléaire française s’inscrit dans une fuite en avant mortifère qui gagne dangereusement le monde, s’alarment des ONG, au moment où l’on commémore l’horreur des 6 et 9 août 1945.
Selon le Comité international de la Croix-Rouge, 220 000 personnes ont péri à Hiroshima et à Nagasaki entre les 6 et 9 août et la fin de l’année 1945. Parmi elles, près de 38 000 enfants. Celles qui ont survécu, les hibakusha, sont la mémoire vivante de l’horreur nucléaire. Elles ont été marquées chaque jour de leur existence dans leur chair et leur esprit : maladies radio-induites, exclusion sociale, stress post-traumatique, fausses couches… Leurs descendants sont également impactés par ces explosions.
Visiter Hiroshima ou Nagasaki bouleverse quiconque se rend sur les lieux de mémoire. Comment expliquer alors qu’Emmanuel Macron ait pu écrire, en 2023, sur le livre d’or du Musée de la paix d’Hiroshima à la suite de la réunion du G7, ces mots de compassion empruntés à Albert Camus, que «la paix est le seul combat qui mérite d’être mené», et marteler, d’un ton martial, ce 13 juillet lors d’un discours aux armées : « Pour être libre dans ce monde, il faut être craint. Pour être craint, il faut être puissant» ?
En quelques secondes, sa compassion pour les victimes s’est effacée au profit de l’affirmation péremptoire d’une puissance qui repose sur la pérennisation d’un arsenal nucléaire et sur l’exercice permanent de la menace d’emploi de ces armes de destruction massive. Au-delà de l’éthique, ces paroles heurtent les fondements mêmes du droit international. Elles contredisent la Charte des Nations unies, qui appelle à «maintenir la paix», à «[s’abstenir] de recourir à la menace ou à l’emploi de la force», à agir pour la réduction des armements. Elles piétinent les principes de sécurité collective, de coopération internationale, d’égalité souveraine entre les peuples.
Les commémorations du 6 et du 9 août n’ont qu’un seul but : rappeler l’impensable pour empêcher qu’il ne se reproduise. Pourtant, les signaux sont inquiétants. Si l’arme nucléaire n’a pas été directement utilisée au cours d’une guerre depuis 1945, le tabou autour de son emploi se fissure. Les discours encourageant à plus d’armes nucléaires comme systèmes de protection (par exemple du Premier ministre belge, De Wever, et du président polonais, Duda) et les actes proliférants (accroissements des arsenaux britanniques et chinois, renforcement de la composante nucléaire aérienne de l’Inde par la vente de Rafale), ajoutés aux menaces explicites (Russie, Corée du Nord) font que sa fin devient possible.
Le Président veut étendre l’ombre de la dissuasion de la france à l’échelle européenne. Faire peur à Poutine, compenser le retrait américain, garantir la sécurité du continent… Ce raisonnement, aux allures de stratégie, n’est en réalité qu’une fuite en avant. Il alimente une spirale d’insécurité, où chaque mouvement provoque une réaction, où la prolifération nucléaire est inévitable.
Confrontée à cette logique de préparation au suicide collectif, une majorité croissante d’Etats, y compris européens, membres ou signataires du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN), contestent aujourd’hui frontalement cette vision du monde fondée sur la dissuasion nucléaire.
Leur attitude repose en premier lieu sur une logique de renforcement de la sécurité collective, et non sur la naïveté ou l’angélisme. Ils veulent, eux aussi, protéger leurs «intérêts vitaux» menacés en permanence par les conséquences potentielles d’un emploi délibéré, involontaire, accidentel ou dû à une erreur de calcul d’armes nucléaires. Ils savent qu’une guerre nucléaire au cœur de l’Europe, ou dans le sud asiatique, aura des conséquences tant humanitaires qu’économiques ou climatiques, quel que soit l’emplacement géographique de leur Etat.
Deuxièmement, ces Etats rappellent que la dissuasion nucléaire est une théorie invérifiable, qui repose sur la chance et une perception de la rationalité des adversaires, or celle-ci est obligatoirement différente pour chacun des protagonistes. Lors de la troisième réunion du TIAN, en mars 2025, ils ont déclaré sans ambiguïté : «L’affirmation selon laquelle la dissuasion nucléaire a déjà permis d’éviter une guerre à ̀ grande échelle et un conflit nucléaire [est] impossible à prouver de manière concluante, et il n’existe aucune certitude quant à son efficacité future.»
Enfin, les gouvernements engagés dans le TIAN sont lucides : la dissuasion nucléaire n’est pas la solution, elle est le problème. Elle entretient une logique d’affrontement, renforce la course aux armements (nucléaires comme conventionnels), fragilise les traités et légitime enfin l’exercice de la menace comme mode de relation entre Etats. L’idée d’européaniser la dissuasion française est un engrenage dangereux. Elle provoquera des réactions russes, nourrira les ambitions d’autres puissances nucléaires ou du seuil, et alimentera la fin du régime de non-prolifération nucléaire.
L’appel d’Albert Camus le 8 août 1945, deux jours après Hiroshima, est plus que jamais d’actualité : «Devant les perspectives terrifiantes qui s’ouvrent à l’humanité, nous apercevons encore mieux que la paix est le seul combat qui vaille d’être mené. Ce n’est plus une prière, mais un ordre qui doit monter des peuples vers les gouvernements, l’ordre de choisir définitivement entre l’enfer et la raison.»
Premières organisations membres de ICAN France signataires :
Greenpeace France, Observatoire des armements, Initiatives pour le désarmement nucléaire, Mouvement national de lutte pour l’environnement, Mouvement pour une alternative Non-violente, Pugwash-France, Union européenne de la paix, Mouvement de la paix, Collectif Bourgogne-Franche-Comté pour l’abolition des armes nucléaires, Abolition des armes nucléaires – Maison de vigilance, Collectif finistérien pour l’interdiction des armes nucléaires, Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples, Agir pour le désarmement nucléaire Bourgogne-Franche-Comté, Feyzin-Europe, Mouvement international de la réconciliation France, Union démocratique bretonne, mouvement Utopia, réseau Sortir du nucléaire.