Réduire le chômage, oui, mais à quel prix ? L’Organisation international du travail (OIT) vient de rendre un rapport sur les conditions de travail dans le monde. Les conclusions sont mitigées : si l’OIT salue la baisse du chômage dans plusieurs régions, notamment en Europe, la qualité de l’emploi, elle, ne s’améliore pas.
Avec notre correspondant à Genève, Jérémie Lanche
Sur le papier, les chiffres paraissent flatteurs. Dans les pays du nord, du sud et de l’ouest de l’Europe, le chômage est à son plus bas niveau depuis dix ans. Il devrait même continuer de reculer jusqu’en 2020.
Mais c’est aussi à cause de l’explosion du travail temporaire, tempère Damian Grishaw, responsable de recherche à l’OIT. « Si nous saluons la baisse du chômage en Europe, nous sommes plus inquiets sur la nature des emplois qui semblent prospérer depuis la fin de la crise de 2008. Il y a les mini-jobs en Allemagne, les CDD parfois d’un jour en France, l’explosion des contrats temporaires en Espagne… Le fait que des demandeurs d’emplois soient forcés d’accepter ces contrats est bien sûr un problème. Parce qu’ils ne leur permettent pas d’obtenir un salaire durable ni de payer un loyer. »
Autres motifs d’inquiétude pour l’OIT : le chômage de longue durée, toujours important. Et la situation fragile des travailleurs indépendants. Environ 20% d’entre eux en France, en Allemagne, en Italie et en Espagne sont à la limite de la pauvreté.
La ministre du Travail, Muriel Pénicaud, avait affirmé à son arrivée au gouvernement qu’elle ne commenterait pas les chiffres du chômage. Une ligne dont elle s’écarte de temps à autre, comme ce matin sur France Info, où elle a expliqué que les chiffres publiés par l’Insee était « une très bonne nouvelle ».
Pour le 4e trimestre 2018, le taux de chômage est en recul de 0,3 point à 8,8% de la population active en France entière (hors Mayotte), son plus bas niveau depuis 2009.
« Cela fait dix ans que l’on n’était pas arrivé à avoir un taux de chômage inférieur à 9% », a expliqué Muriel Pénicaud. « C’est dû notamment aux réformes du marché du travail qui commencent à produire leurs effets », a-t-elle affirmé.
« On voit que les employeurs, notamment les petites entreprises, n’ont plus peur d’embaucher, et ça c’est l’effet des ordonnances« , a-t-elle dit, évoquant aussi « plus de jeunes en apprentissage » et « plus de demandeurs d’emplois dans des formations de qualité ».
« Evidemment cela reste un taux très élevé », mais « cela nous indique qu’il n’y a pas de fatalité ». « On s’est tellement habitué au chômage de masse en France que par moment on croit qu’il faut baisser les bras. Non, il ne faut pas baisser les bras, on va continuer ». Interrogée sur la promesse de parvenir à un taux de chômage de 7%, elle a indiqué que c’était une « trajectoire qu’il fallait garder ».
Comme on lui demandait si la crise des « gilets jaunes » allait avoir un impact sur l’emploi en 2019, elle a répondu: « Oui, c’est une crainte que j’ai car les petites entreprises et le commerce ont beaucoup souffert ». La ministre a fait état de « 72.000 demandes de chômage partiel » qui représentent « 38 millions d’euros » provisionnés à son ministère.