Samedi 4 décembre, plusieurs milliers de personnes ont manifesté à Paris : délégations d’hôpitaux, personnels de santé, médecins, usagerEs, militantEs syndicalistes et collectifs, touTEs ensemble pour dénoncer la faillite du système de santé, et en premier lieu la situation désastreuse des hôpitaux publics.
D’autres rassemblements plus modestes ont eu lieu dans de nombreuses villes, parfois au niveau régional comme en Bretagne. Cette journée faisait suite à de nombreuses mobilisations catégorielles depuis plusieurs mois : sages-femmes, infirmières de bloc, infirmières anesthésistes, brancardierEs, personnels de réanimation, des urgences, pompiers, psychologues, secteur de la psychiatrie, etc. et aussi des grèves dans des cliniques, des Ehpad, pour les salaires et des embauches.
Partout, c’est le même constat : le système de santé se désintègre avec des fermetures de lits, de services, des conditions de travail insoutenables et des démissions en cascade.
Le gouvernement se félicite d’avoir saupoudré quelques millions ici et là pour calmer les esprits. Mais cela ne résout rien, loin de là !
L’hôpital public et l’ensemble du système de santé ont besoin d’un plan d’urgence avec non seulement une vraie reconnaissance salariale, au moins 400 euros d’augmentation pour touTEs, mais aussi un plan de formation massif pour pouvoir embaucher les centaines de milliers de personnels qui manquent cruellement et réouvrir les lits, les services, les hôpitaux fermés depuis des années, et mettre fin à la précarité !
C’est la condition pour travailler correctement, avec humanité, ne plus avoir besoin de « trier » les malades, pour faire disparaître les files d’ambulances devant les urgences, et pour ne pas avoir à craindre en permanence qu’un afflux imprévu de malades, covid ou autres, paralyse tout le système…
C’est l’ensemble du système de soins qu’il faut réorganiser en créant un grand service public incluant hôpitaux, cliniques, médecine libérale, pour en finir avec les déserts médicaux, ne plus devoir refuser des patientEs en détresse et assurer un égal accès aux soins à tous.
Pour en finir avec l’hôpital entreprise, la santé n’est pas une marchandise !
Plus nombreux qu’à l’accoutumée – 6 000 selon une source syndicale, 2 100 selon la préfecture de police –, les manifestants réclamaient aussi de meilleures conditions de travail pour les soignants. Le Monde + AFP
Les hausses de salaires du « Ségur de la santé » n’ont pas éteint les revendications des soignants. Quelques milliers de personnes ont défilé, samedi 4 décembre, près du ministère de la santé, à Paris, pour réclamer l’arrêt des fermetures de lits dans les hôpitaux publics et de meilleures conditions de travail pour les soignants.
Tout au long de leur – court – cortège entre les Invalides, l’hôpital Necker et le ministère, les manifestants ont repris le slogan : « On veut des lits, des postes, pour l’hôpital public ». Sur le dos de Magali (qui n’a pas souhaité donner son nom), on pouvait lire un message inscrit en lettres blanches : « Hôpital en urgence vitale ». « Depuis cet été, on a cinq lits de fermés, faute de personnels », décrit au Monde cette infirmière de réanimation dans un hôpital de la banlieue parisienne. Dans son service, qui compte dix lits de réanimation « ouverts », il y a cinq patients atteints du Covid-19.
« On aime notre hôpital, notre métier, mais les années passent et c’est toujours la même chose, les vagues de départ de soignants, les gens qui ne sont pas remplacés… », dit-elle, décrivant les difficultés à se loger en région francilienne avec son salaire.
Entre 2 100 et 6 000 personnes
Plus nombreux qu’à l’accoutumée – 6 000 selon une source syndicale à l’Agence France-Presse, 2 100 selon la préfecture de police –, ils étaient d’abord venus demander « en urgence l’arrêt de toutes les fermetures programmées de lits », afin d’envoyer « un message très clair » pour « rassurer les agents de l’hôpital dans un contexte de nouvelle vague » de Covid, a déclaré Yves Veyrier, secrétaire général de Force ouvrière, à l’AFP.
Le syndicat, dont la section de l’hôpital Nord-Mayenne est à l’origine de cette manifestation, avait appelé ses adhérents à se mobiliser. La CGT, SUD, plusieurs collectifs de soignants (Collectif inter-urgences, Collectif inter-hôpitaux, Santé en danger) et quelques partis politiques (La France insoumise, Europe Ecologie-Les Verts) étaient également présents, de même que des associations d’usagers de petits établissements comme Amilly (Loiret) ou Longjumeau (Essonne).
Plusieurs élus, l’écharpe tricolore à l’épaule, étaient également présents dans les cortèges, notamment des représentants du département de la Mayenne, qui comptait une délégation de soignants dans le défilé. « On est là pour défendre notre hôpital, dit Florent Bercault, maire de Laval, accompagné de plusieurs maires et députés de Mayenne. Nos hôpitaux sont en grande difficulté, on manque de ressources médicales, les urgences de Laval ont dû fermer plusieurs nuits ces derniers mois. Nous souffrons d’un sous-investissement chronique, il faut des annonces fortes pour redresser l’hôpital et le système de santé. »
« Des bombes à retardement »
Les conditions de travail étaient aussi sur toutes les lèvres. « Je vois l’hôpital qui se dégrade depuis vingt ans, avec des soignants de plus en plus précarisés, dénonce Sylvie Dubourdieu, biologiste dans un établissement de santé des Yvelines. Il y a des conditions inacceptables, comme sur le travail de nuit. » Adhérente au collectif Santé en danger, la praticienne hospitalière manifeste dans la rue pour la première fois.
« Les gens s’en vont, le Covid n’a fait qu’ouvrir les yeux aux soignants, beaucoup n’acceptent plus l’inacceptable », dit-elle. A titre personnel, elle est là aussi pour dénoncer l’absence du moindre effort pour les salaires des praticiens hospitaliers comme elle, déjà à l’hôpital : « Le Ségur de la santé [plan du gouvernement pour l’hôpital annoncé à l’été 2020] a fait croire qu’on allait augmenter nos grilles, alors que nous, qui suppléons depuis des années les 30 % de postes vacants, on a perdu quatre ans d’ancienneté par rapport aux nouveaux praticiens… on ne fait vraiment rien pour donner envie de rester à l’hôpital. »
Même sentiment pour Christophe Trivalle, gériatre à l’hôpital Paul-Brousse (AP-HP) et membre du Collectif inter-hôpitaux. « On est reparti comme avant à l’hôpital, on nous reparle de nos chiffres d’activité qui ne suffisent pas, avec ce système de la tarification à l’activité qui perdure, quand on a besoin de moyens, de matériel, on ne les a pas… c’est un retour à “l’anormal” », estime-t-il.
« Mais la situation s’est aggravée aujourd’hui, reprend-il. Avec encore moins de personnels soignants, Covid ou pas Covid, la période des fêtes va être très difficile, les fermetures de lits remontent en flèche, tous les services sont touchés. » Chez lui, en gériatrie, le service déborde déjà :« On a été obligé cette semaine de refuser et de renvoyer à domicile plusieurs patients souffrant d’Alzheimer, agités, violents, avec des troubles du comportement… mais ce sont des bombes qui vont exploser à un moment. »