Après une année marquée par les restrictions sanitaires, le coût des trajets du chef de l’Etat à bord des avions de la flotte gouvernementale a été multiplié par deux en 2021, selon la Cour des comptes.
Par Barthélémy PhilippeJournaliste politique
Emmanuel Macron est remonté dans l’avion. La Cour des comptes a publié le 15 juillet son traditionnel rapport sur les comptes et la gestion des services de la présidence de la République. Parmi d’autres enseignements, on apprend que le coût des voyages du chef de l’Etat à bord des avions de l’escadron de transport 60 (mis à la disposition du président et du gouvernement par le ministère des Armées) a atteint 4,4 millions d’euros en 2021. Un montant deux fois plus important que celui constaté par les Sages de la rue Cambon, un an plus tôt. Ce différentiel tient essentiellement au moindre recours à l’A330 présidentiel pendant le pic de la crise sanitaire, en 2020. Avec un coût d’utilisation qui dépasse les 20.000 euros par heure de vol, il s’agit de l’avion le plus cher de la flotte gouvernementale.
Sur ce point, l’année 2021 a été marquée par un retour progressif à la normale. Selon les Sages de la rue Cambon, la présidence a privilégié le recours à l’A330 (généralement réservé aux longs voyages extra-européens) à 7 reprises, sur un total de 54 déplacements aériens. Ce qui correspond aux habitudes des années pré-pandémiques. “Par conséquent, en 2021 les dépenses d’ET60 sont revenues au niveau de 2019”, notent les magistrats financiers.
Malgré leur caractère onéreux, les trajets aériens du chef de l’Etat ne représentent qu’une part minoritaire (48%) du coût total des déplacements présidentiels en 2021. En tenant compte des voyages par la route, qui nécessitent la mise en en place d’un convoi pour sécuriser le véhicule du chef de l’Etat, les 106 déplacements d’Emmanuel Macron ont entraîné 10,5 millions d’euros de dépenses.
Un montant inférieur à celui constaté en 2019 (14 millions d’euros, 108 déplacements) malgré un rythme équivalent. Cela tient au fait que les déplacements en France métropolitaine ont été privilégiés en 2021, détaille la Cour.
Enfin, Emmanuel Macron a reversé près de 1.000 euros au budget de la présidence, au titre de ses (rares) déplacements d’ordre privé avec son épouse à bord des avions de l’ET60. Pour rappel, la règle fixée par l’Elysée veut que dans un tel cas de figure, le couple présidentiel rembourse le coût du transport sur la base du prix d’un vol commercial.
Brigitte Macron : ce que l’Etat dépense pour la Première dame
Même si Brigitte Macron ne dispose d’aucun statut officiel, la présidence de la République mobilise des moyens humains et financiers non négligeables pour lui permettre d’assumer son rôle aux côtés d’Emmanuel Macron, et les missions particulières qui lui sont confiées.
Par Barthélémy PhilippeJournaliste politique
Brigitte Macron est une First Lady qui dure. Grâce à la réélection de son mari, en avril dernier, l’ex-professeur de français va passer cinq années de plus à l’Elysée. Une longévité exceptionnelle depuis Bernadette Chirac, qui avait porté ce costume parfois encombrant pendant 12 années, de 1995 à 2007. Si ce rôle implique certains désagréments, une exposition médiatique constante et une vie familiale bouleversée notamment, il offre aussi quelques avantages que rappelle la Cour des comptes, dans son rapport annuel sur les comptes et la gestion des services de la présidence de la République, dévoilé le 15 juillet dernier.
Brigitte Macron est chargée de diverses missions bénévoles, détaillées dans une charte de transparence édictée par l’Elysée en 2017. Elle doit représenter la France aux côtés du chef de l’État lors des sommets et réunions internationales, répondre aux sollicitations des Français, superviser les réceptions officielles au palais de l’Élysée et soutenir des œuvres caritatives, culturelles ou sociales qui participent au rayonnement international de la France. En contrepartie, la présidence de la République met à sa disposition un cabinet. Celui-ci est composé de deux collaborateurs partagés avec le chef de l’Etat, ainsi que de deux assistantes, dont une à mi-temps.
“Leur rôle est d’assurer la gestion de l’agenda, les relations avec la presse ainsi que de préparer les rendez-vous et les déplacements. Ils participent également à l’organisation d’événements et réceptions au palais de l’Élysée”, précise le rapport de la Cour des comptes.
Selon les Sages de la rue Cambon, les dépenses directement imputables aux activités des membres du cabinet de Brigitte Macron (hors activités conjointes de représentation et ressources mutualisées) ont atteint 292.454 euros en 2021. En légère augmentation par rapport à 2020, cette somme représente moins de 0,5% des dépenses totales de la présidence de la République, elles-mêmes évaluées à 107 millions d’euros.
Toutefois, d’autres dépenses, pas toujours chiffrées par les magistrats financiers, s’ajoutent à la masse salariale du cabinet de Madame Macron. Pour ses activités publiques et officielles, la Première dame profite par exemple des services de la coiffeuse-maquilleuse de la Présidence. La rémunération de cette dernière, non publique, est comprise dans le montant forfaitaire mensuel de 5.200 euros consacré aux prestations esthétiques du couple présidentiel.
En outre, l’épouse du président participe à certains voyages officiels de son mari : 9 en 2021, dont 3 à l’étranger, qui ont nécessité l’affrètement des avions de la flotte gouvernementale ET60. La Première dame se déplace également seule, en train ou en voiture, dans le cadre de ses activités publiques. Hors Île-de-France, cela s’est produit à 12 reprises en 2021, soit trois fois plus qu’en 2020, une année violemment impactée par les restrictions liées à la crise sanitaire.
Enfin, Brigitte Macron est une Première dame populaire. Énormément sollicitée par les Français, elle reçoit en moyenne 60 courriers par jour (21.500 en 2021, 25.000 en 2020), dont le traitement mobilise 6 agents du service de la communication de l’Elysée.
Par Barthélémy PhilippeJournaliste politique
Visiblement, certaines promesses d’Emmanuel Macron n’engagent que ceux qui les écoutent. Quelques jours après sa réélection, le chef de l’Etat laissait filtrer dans la presse son intention de nommer un gouvernement resserré en vue des législatives des 12 et 19 juin dernier, avec une quinzaine de membres, pas plus. “Il n’y aura pas d’armées mexicaine”, jurait l’entourage du locataire de l’Elysée à France Info, dans une référence à peine voilée aux 42 ministres et secrétaires d’Etat (presque un record) du gouvernement Castex.
Las, le 20 mai dernier, jour de l’annonce de la composition du gouvernement Borne I, le secrétaire général de l’Elysée Alexis Kohler a longuement égrené les noms de 28 ministres, dont 15 “survivants” de l’ère Castex. Loin des promesses initiales. Pire, à l’occasion du remaniement post-législatives du 4 juillet, Elisabeth Borne a étoffé son gouvernement en nommant 16 nouvelles personnalités (6 secrétaire d’Etat, 10 ministres), alors qu’elle aurait pu se contenter de pallier les départs (Damien Abad, Justine Bénin, Yaël Braun-Pivet, Brigitte Bourguignon, Amélie de Montchalin).
Résultat, le gouvernement Borne II totalise 42 membres, Première ministre incluse, soit presque autant que l’équipe qui l’a précédée. Il faut remonter au gouvernement de Jean-Pierre Raffarin en 2004 (43 membres) pour retrouver un exécutif aussi foisonnant que ceux de Jean Castex et Elisabeth Borne. Heureusement, le record absolu de la Ve République, détenu par Michel Rocard et son bataillon de 49 ministres, n’a pas été égalé.
Outre qu’elle nuit à la lisibilité de l’action publique et invisibilise la plupart des ministres, cette débauche de moyens humains n’est pas sans conséquence pour les finances publiques. Selon nos calculs (voir méthodologie en fin d’article), la masse salariale annuelle des 42 membres du gouvernement Borne, Première ministre incluse, va atteindre 5,1 millions d’euros. Un montant quasi égal à celui du gouvernement Castex (5,2 millions d’euros), qui comptait un ministre de plus.
Pour trouver un gouvernement plus coûteux que ceux de Jean Castex et Elisabeth Borne, il faut remonter au moins 10 ans en arrière, c’est-à-dire avant que François Hollande, à son arrivée au pouvoir, ne baisse de 30% le traitement du président de la République ainsi que ceux du Premier ministre et des ministres. Malgré des effectifs plus restreints, la masse salariale des gouvernements Fillon II (32 membres, de juin 2007 à novembre 2010) et Fillon III (33 membres, de novembre 2010 à mai 2012) atteignait 5,5 millions d’euros.
Bien entendu, la masse salariale des ministres ne représente qu’une fraction du coût de fonctionnement d’un gouvernement, puisqu’elle n’intègre ni les rémunérations des conseillers ministériels (au nombre de 570, en 2021), ni celles des personnels chargés des fonctions support (cuisiniers, chauffeurs, secrétaires, officiers de sécurité…), qui occupaient 2.302 emplois sous Jean Castex.
En s’appuyant sur les documents budgétaires annexés au projet de loi de finances pour 2022, le député honoraire René Dosière, spécialiste du train de vie de l’Etat, avait estimé le coût global du gouvernement Castex à 160 millions d’euros par an, ce qui en faisait selon lui “le plus cher de la Vème République”. La présentation du projet de loi de finances pour 2023, fin septembre, permettra de savoir si le gouvernement Borne II fait tomber le triste record détenu par son prédécesseur, au grand dam des contribuables.
Méthodologie : Pour calculer la masse salariale annuelle des 42 membres du gouvernement Borne II, nous avons tout simplement additionné le traitement annuel de la Première ministre (182.436 euros) avec les rémunérations des 31 ministres (121.613 euros/an) et des dix secrétaires d’Etat (115.000 euros/an).