10h30 – Parvis de la Cathédrale à Orléans, Place du Pâtis à Montargis et Place de la Victoire à Gien
La loi : décryptage
1. L’allongement de la durée de cotisation est reporté à 2020: FAUX
La durée de cotisation pour bénéficier de la retraite à taux plein des assurés sociaux du régime général et des fonctionnaires est actuellement de 166 trimestres (41, 5 ans) pour la génération à compter de 1955. Elle passera à 167 trimestres pour la génération de 1958 qui prendra sa retraite en 2020. En effet, la loi Fillon qui lie la durée de cotisation aux gains d’espérance de vie est maintenue, et entre 2020 et 2035, la durée de cotisation est à nouveau augmentée d’un trimestre de plus tous les trois ans pour atteindre 43 ans pour celles et ceux néEs à partir du 1er janvier 1973.
2. Le gouvernement ne touche pas au système actuel des retraites: FAUX
Un article du projet de loi intitulé « Règles et dispositif de pilotage » précise le rôle d’un « comité de surveillance des retraites composé de cinq personnes compétentes en matière des retraites » qui devra chaque année faire des recommandations pouvant avoir pour effet « d’augmenter le taux de cotisations des régimes de base et complémentaires au-delà des bornes fixées par décret » et aussi « de réduire le taux de remplacement (pourcentage du salaire conservé lors du départ en retraite) assuré par les retraites au-delà des bornes fixées par décret ».
Les pensions versées par la Sécurité sociale et les régimes complémentaires fonctionnent actuellement selon le principe des prestations définies : le financement doit s’adapter au montant des pensions. Selon les nouvelles règles, les cotisations ne devraient pas dépasser un plafond défini auparavant et les pensions s’adapter chaque année au financement. On bascule dans un système de « cotisations définies », y compris pour les complémentaires, les prestations devant s’adapter aux recettes.
Ce changement systémique est une rupture avec les principes de 1945, selon lesquels chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins. Il a entraîné une dégradation importante du niveau de vie dans plusieurs pays, notamment en Suède.
3. L’âge de départ à la retraite n’est pas repoussé: FAUX
L’âge légal reste fixé à 62 ans… mais dans la réalité ce ne sera pas possible pour l’immense majorité des salariéEs. Ils ne toucheraient dans la plupart des cas qu’une pension rabotée en raison de la décote qui s’applique sur son montant, faute d’avoir travaillé le nombre de trimestres requis. Pour toucher une retraite à taux plein, la génération de 1973 devra travailler sans discontinuer à partir de 17 ans !
4. Les mesures sur la pénibilité au travail sont une avancée importante: FAUX
Le gouvernement annonce des mesures dites de justice sociale, la mesure phare étant « le compte pénibilité au travail » destiné uniquement aux salariés régis par le droit privé. La pénibilité est limitée aux critères définis par le code du travail : « contraintes physiques marquées, environnement physique agressif, rythmes de travail susceptibles de laisser des traces durables identifiables et irréversibles sur sa santé ».
Les trimestres de travail exposés à la pénibilité, selon la déclaration de l’employeur, valideront des points qui permettront de bénéficier de congés formation afin de changer de métier, de travailler à temps partiel payé à temps plein en fin de carrière, ou de bénéficier d’une majoration du nombre de trimestres cotisés. Les barèmes seront définis par décret. Des limites sont déjà apportées au dispositif : plafonnement du nombre de points, obligation d’utiliser des points pour la formation, possibilité pour l’entreprise de refuser le temps partiel prévu pour les travailleurs en fin de carrière…
Bref, il y aura peu d’élus et ils bénéficieront de faibles compensations, au mieux une retraite anticipée d’un ou deux trimestres. Rien n’est prévu par le gouvernement pour ce qui devrait être primordial : lutter contre la pénibilité, imposer des changements dans l’organisation du travail, tout ce qui engendre souffrance morale et physique.
5. C’est une réforme en faveur des jeunes: FAUX
Parmi les jeunes en formation professionnelle, seulEs les apprentiEs pourront valider les trimestres en stage. Les étudiants notamment sont exclus de cette disposition. La durée des études et des formations ne sera pas prise en compte.
Le rachat des quelques années d’étude devrait toujours être possible à la fin des études et à des conditions fixées par décret. Elle serait selon les annonces gouvernementales possible jusqu’à 4 trimestres maximum, dans les 5 ou 10 ans suivant la fin de leurs études, et un peu moins prohibitives qu’actuellement… mais inatteignables pour la plupart des jeunes.
Les générations successives seront de plus en plus pénalisées par les allongements des durées de cotisation.
6. Les fonctionnaires ne sont pas concernés: FAUX
L’allongement de la durée de cotisation et l’augmentation des cotisations concernent aussi bien les fonctionnaires que le secteur privé. Le gouvernement n’a toutefois pas osé à cette étape aligner les régimes spéciaux (SNCF, RATP, EDF-GDF, etc.) sur le régime général, ni modifier le calcul des pensions des fonctionnaires (calculées sur les 6 derniers mois) en les alignant sur le régime général (prenant en compte les 25 meilleures années). Il espère ainsi éviter une mobilisation d’ensemble.
À noter que les indemnités et primes diverses ne sont pas prises en compte pour le calcul des retraites des fonctionnaires, et que de ce fait le niveau respectif des pensions versées aux ancienEs salariéEs du public et du privé est proche.
7. Il n’y aura pas de gel des pensions: FAUX
Depuis 1987, le montant des pensions n’évolue plus comme les salaires, mais est indexé sur l’indice officiel des prix. Une nouvelle mesure va aggraver la dégradation du niveau de vie des retraitéEs. La revalorisation annuelle des pensions au 1er avril sera reportée au 1er octobre, sauf pour les personnes titulaires du minimum vieillesse (« l’allocation de solidarité aux personnes âgées », prestation sans contrepartie de cotisation destinée aux personnes qui ont des revenus inférieurs à 787, 26 euros net par mois). Ce gel des pensions pendant 18 mois permettra une « économie » de 0, 6 milliard en 2014, de 2 milliards en 2020… une économie piquée dans la poche des retraités.
8. L’augmentation des cotisations est « équitable »: FAUX
Les parts patronale et salariale des cotisations augmenteront dans les mêmes proportions : 0, 14 % en 2014, puis 0, 05 % les années suivantes, au total 0, 30 % (à l’étape actuelle). L’augmentation de la part salariale diminue le pouvoir d’achat des salariés (54 euros par an pour un salarié au Smic en 2020). Les patrons n’auront eux rien à payer, car Jean-Marc Ayrault a annoncé une compensation intégrale de l’augmentation de la part des employeurs. Ce nouveau cadeau aux patrons sera payé par les actifEs et les retraitéEs.
9. Les mesures en faveur des femmes réduiront les inégalités: FAUX
L’allongement de la durée de cotisation augmentera les inégalités de pension entre les hommes et les femmes, qui ont des carrières plus courtes, plus discontinues, tandis que les mesures annoncées sont minimales et très vagues.
Le salaire moyen des femmes est inférieur de 27 % celui des hommes, le montant des pensions de retraite est moindre de 42 %. Le projet de loi prévoit de « faciliter l’acquisition de trimestres pour les assurés à faible rémunération » et de « mieux compenser l’effet sur les pensions des interruptions de carrières liées aux jeunes enfants ». Les mesures effectives sont renvoyées à des décrets.
La seule mesure concrète porte sur la validation des trimestres de travail à temps partiel des salariéEs du privé pour qu’ils soient pris en compte dans le calcul de la pension. Pour cela, il faudra gagner durant un trimestre 150 fois l’équivalent du SMIC horaire au lieu de 200 fois.
Les travailleurs qui n’ont pas d’autres choix que des contrats courts, bien souvent des femmes, pourront bénéficier de plus de trimestres validés, mais l’augmentation des retraites restera dans la majorité des cas très minime. C’est le reflet des bas salaires. Cette mesure peut inciter les employeurs à multiplier les contrats de travail très courts et donc à développer la précarité puisqu’aucune mesure n’est envisagée pour lutter contre elle.
Un nouveau pas dans la destruction de la « Sécu »
Autre document à télécharger pour plus de détails sur cette réforme:
« Vers de nouvelles règles de calcul de la retraite »: Le projet de loi de réforme des retraites