Le Jeudi 5 mars, à 13 h, devant le tribunal d’Orléans, le mot solidarité a pris toute sa signification.
Solidarité pour Chris et Siaka car la procureur, qui estime qu’il y a doute sur leurs actes de naissance les avait fait convoquer devant le tribunal de grande instance, pour usage de faux et escroquerie.
Plus d’une quarantaine de jeunes sont venus soutenir leurs copains. Ils savent l’importance de la mobilisation et qu’ils pourraient à leur tour avoir besoin de la même solidarité, car la justice a décidé de continuer sa chasse aux jeunes Isolés Etrangers.
Une trentaine de soutiens a participé à l’action tout au long de l’après-midi. Déjà exaspérés par l’attitude du Conseil général du Loiret qui depuis des années fait subir à ces jeunes des pressions insensées en leur refusant la protection et les droits dus à tout mineur en danger, ils sont scandalisés que maintenant la justice poursuive ces jeunes.
Chris et Siaka ont dû répondre à une avalanche de questions suspicieuses, quelquefois même agressives de la part de la juge. Mais ils ne se sont pas laissés intimider et ont répondu point par point à ces questions.
La procureur est restée inflexible. Doutant des documents présentés par les deux jeunes, s’appuyant sur les résultats des tests d’âge osseux, pourtant reconnus non fiables, procédant par allégations très contestables quant aux évaluations effectuées par l’Aide Sociale à l’Enfance elle a conclu en demandant de la prison avec sursis.
La réponse de l’avocate n’a pas tardé et a été directe et cinglante. Contestant les dires de la procureur quant à la position de l’Aide Sociale à l’Enfance, notamment concernant l’évaluation qui ne remettait absolument pas en cause la minorité des deux jeunes, expliquant que les deux jeunes avaient subi des tests osseux sans consentement, alors que présumés mineurs donc sans autorisation d’un représentant légal, sans que cet acte médical ait pour but de les soigner et alors que le milieu médical indique unanimement une marge d’erreur d’environ 18 mois.
Elle a interpelé le tribunal lui demandant de regarder ces deux jeunes et de considérer combien la justice était rapide voire expéditive les concernant en comparaison des délais de passage devant le tribunal pour des délits.
De fait, sa plaidoirie a mis le doute auprès du tribunal.
Le juge a décidé un complément d’enquête, avec adresse à l’ambassade de Côte d’Ivoire pour vérifier les actes et les noms, plus un nouveau test médical auprès d’un pédiatre.
Si cette décision met à mal la procédure de la procureur en ce qu’elle a négligé de contacter les autorités du pays d’origine des jeunes, elle interroge d’une part sur l’idéologie qui sous tend la demande d’examen médical (dentition et organes génitaux). Ces vérifications sont aussi peu fiables que les tests d’âge osseux (radio du poignet) et encore plus dégradantes ! Nous rappelons que, quasi unanimement, les instances médicales et éthiques récusent la validité et condamnent l’utilisation de l’ensemble de ces examens à d’autres fins que médicales.
D’autre part, bien que mise à mal dans sa procédure, la procureur continue dans sa logique, puisqu’un nouveau jeune confié par un juge des enfants à l’ASE jusqu’à ses 18 ans a été mis en garde à vue dès le lendemain matin, remettant ainsi en question une décision judiciaire ordonnée depuis des mois.
La procureur met en garde à vue tous les mineurs isolés un par un pour trouver des arguments à des fins de prise en charge par l’ASE et pour les renvoyer au pays.
Chris et Siaka passeront à nouveau au tribunal le 24 septembre 2015.
Nous devrons renouveler notre solidarité.
Mais d’ici là, il nous faudra aussi soutenir les autres jeunes à leur tour convoqués devant le Tribunal.