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Réforme des retraites: où sont les jeunes?

En pointe dans de nombreux mouvements sociaux, la jeunesse semble à la traîne contre la réforme des retraites. Et les grands syndicats nationaux ne sont pas étrangers à ce phénomène.

Par Anthony Berthelier

RETRAITES – “Dans le rapport de force en cours, l’entrée de la jeunesse sera décisive.” Pour le porte-parole du syndicat Solidaires Éric Beynel, il ne fait aucun doute que la mobilisation des lycéens et étudiants jouera un rôle crucial dans l’avenir du mouvement social initié contre la réforme des retraites.

Et pour le moment, on ne peut pas dire que les premiers concernés par la création historique d’un système à points ne soient les fers de lance d’une contestation qui vit son huitième grand acte ce mercredi 29 janvier.

Au contraire, la jeunesse ferait presque figure de petit poucet face au nombre pléthorique de secteurs professionnels en colère. Traditionnellement emmenée par la RATP et la SNCF, la contestation est aujourd’hui effectivement suivie par les avocats, les soignants, les danseurs de l’opéra ou encore les enseignants. Avec souvent le même état d’esprit: “penser à l’avenir nos enfants.”

D’où l’espoir tinté d’impatience des syndicats nationaux, qui ont réussi à fédérer bon nombre de secteurs professionnels mais qui peinent à soulever les jeunes. Entre mauvais calendrier et précarité étudiante… les raisons de cette mise en retrait sont nombreuses. Et les syndicats n’y sont sans doute pas totalement étrangers.

La précarité étudiante, frein à la mobilisation

Comment mobiliser les étudiants sur leur retraite, quand ils peinent à subvenir financièrement à leurs besoins pendant leurs études? C’est l’une des principales questions que doivent résoudre les organisations syndicales pour emmener avec elles la fronde de la jeunesse. “Un étudiant sur deux doit travailler en dehors de ses études pour vivre”, rappelle au HuffPost le chercheur en science politique Samuel Hayat, qui voit dans la précarité étudiante actuelle un frein à la mobilisation des jeunes. “Ils ont des luttes plus immédiates”, nous explique ce chercheur mobilisé, lui aussi, contre la réforme des retraites et la loi de programmation pluriannuelle de la Recherche.

“Le chômage des jeunes est endémique, la pression du résultat et des examens n’en est que plus forte”, détaille-t-il. Un contexte peu propice à une mobilisation sociale qui de fait provoque des absences en cours, voire des examens à repasser.

La présidente de l’Unef confirme cette sorte d’attentisme étudiant. Même si elle le formule en d’autres termes. “La mobilisation des jeunes est progressive”, explique Mélanie Luce au HuffPost avant de pointer elle aussi les difficultés des étudiants pour justifier des rangs clairsemés. “Ils sont inquiets pour leurs examens, pour leurs études et pour leur avenir. Les retraites sont un sujet très  lointain. Les jeunes ont donc forcément mis plus de temps pour prendre la mesure de qui leur était promis”, détaille-t-elle.

Les syndicats sont-ils à l’écoute?

Reste que la présidente du syndicat étudiant se dit désormais “déterminée” pour massifier le mouvement, sur deux fronts: la réforme des retraites et la précarité étudiante. Et ce, malgré l’affaiblissement des réflexes syndicaux à l’Université, que Mélanie Luce nous résume en une anecdote: “pendant la mobilisation massive contre Parcoursup, pas mal d’étudiants venaient dans les Assemblées générales mais n’allaient pas dans la rue car ils ne voyaient pas l’utilité de la manifestation.” De quoi invisibiliser les militants à l’heure où la réussite d’un mouvement social se juge entre autres à l’aune des chiffres de participation dans les manifestations.

Si les syndicats prenaient plus au sérieux les revendications de la jeunesse… » Samuel Hayat, chercheur en science politique au CNRS Alors quelle responsabilité pour les grands syndicats dans la mise en retrait des jeunes pendant cet hiver social? Elle est grande pour Samuel Hayat qui s’agace de voir des responsables appeler ou souhaiter le soulèvement de la jeunesse: “les jeunes ne sont pas mobilisables sur demande.”

“Lorsqu’un jeune homme s’est immolé par le feu devant le Crous à Lyon entraînant un fort mouvement social contre la précarité étudiante, on n’a pas vu les syndicats de travailleurs reprendre à leur compte les revendications des étudiants”, rappelle-t-il HuffPost.

Entrave à la mobilisation

Pour lui, les organisations devraient “reprendre” leur travail syndical auprès de la jeunesse plutôt qu’attendre une éventuelle mobilisation. “Si les syndicats prenaient plus au sérieux les revendications de la jeunesse, elle serait sans doute plus encline à se mobiliser le moment venu”, croit-il savoir.

Reste cependant que, de l’aveu des organisations étudiantes comme des spécialistes des$ mouvements sociaux, il est désormais plus complexe pour les jeunes de s’organiser. “La mobilisation demande des ressources, notamment pour se réunir. Et au contraire, il est de plus en plus difficile désormais d’obtenir ne serait-ce que la location d’une salle de classe pour faire des Assemblées générales”, nous explique Samuel Hayat.

Pour Mélanie Luce, les responsables d’Université se rendent coupables “d’entrave à la mobilisation.” Elle déplore des “complications au quotidien” pour les organisations étudiantes qui veulent réunir les jeunes. “Certaines facs ont même été fermées par crainte d’éventuelles Assemblées générales”, s’agace la présidente de l’Unef en parlant du campus de Tolbiac interdit dès le 2 décembre, soit trois jours avant le premier appel à la grève.

Le recours “quasi systématique” aux forces de l’ordre pour libérer les établissements bloqués ou perturbés n’incite pas non plus à la mobilisation massive. “Les présidents d’Université n’ont plus peur de faire appel à la police”, s’inquiète l’étudiante, tout comme le chercheur en science politique Samuel Hayat, qui pointe à son tour un “tournant sécuritaire et autoritaire dans la gestion des Universités.”

On a essayé de faire la liste de tous les secteurs professionnels en colère depuis un an 89% des Français pensent que des actions violentes contre les institutions vont se multiplier

Anthony Berthelier Journaliste au HuffPost

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Cette entrée a été publiée le 1 février 2020 par dans Actualités des luttes, anticapitalisme, FRANCE, JEUNES, retraites.
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