(document d’étude et projections)
Loi Blanquer « pour une école de la confiance » 26 juillet 2019 (1), Loi Dussopt
« transformation de la fonction publique » 6 aout 2019 (2), projet de reforme des
retraites (en cours) et redefinition du metier enseignant (en cours) sont lies.
Les personnes travaillant au sein des administrations publiques ne relèvent pas du code du travail, contrairement aux salariés du secteur privé, liés par contrat avec leurs employeurs.
Cette situation statutaire des fonctionnaires tient à la nature des fonctions qu’ils exercent.
Ces fonctions intéressent l’ensemble des citoyens. Elles doivent s’exercer dans le respect des principes démocratiques du service public : impartialité, neutralité, probité, égalité de traitement des citoyens. Ainsi, le statut est d’abord une protection des citoyens. En protégeant les fonctionnaires de l’arbitraire, il évite l’instrumentalisation de l’administration à des fins partisanes par un pouvoir politique quelconque.
Ces principes fondamentaux du statut de fonctionnaire ont été posés et reconnus dès le
début du XXème siècle. Ils sont fondateurs de la confiance réciproque entre
l’administration publique et les citoyens et constituent, à ce titre, l’un des piliers sur
lesquels repose toute société démocratique. C’est pourquoi ils doivent demeurer, quelles quesoient les évolutions de la société. (3)
A la fin de notre carriere nous touchons une pension (donc un salaire a vie). Avec la
reforme des retraites et avec la mise en place de la rupture conventionnelle au 31 decembre 2019, publiee au 1 janvier 2020 pour une experimentation sur 5 ans. Avec la reforme des retraites l’Etat devra cotiser comme les autres employeurs ce qui va entrainer une diminution massive de la cotisation employeur de l’Etat :
Ancien système :74,28% + 11,10% de cotisation des fonctionnaires soit 85,38% .
Nouveau système : 16,87% pour l’etat + 11,25% pour le fonctionnaire soit 28,12%.
55 milliards d’euros a seulement 14,6 milliards d’euros dans le nouveau systeme et donc autant d’economie pour le gouvernement sur lesquels des reliquats seront utilises pour la revalorisation de notre metier. (4)
La rupture conventionnelle est bipartite, les deux parties doivent etre en accord sur
cette rupture :
→ L’ Etat pourra donc toujours nous empecher de partir si nous le souhaitons. Cette rupture
conventionnelle dependra de l’echelon et fera egalement l’objet d’une negociation par le salarie.
→ Si l’education nationale desire nous faire partir : mise en place actuellement de la
≪ redefinition du metier enseignant ≫ et M. Blanquer correle notre ≪ revalorisation ≫ a cette
redefinition ET a la mise en place la reforme des retraites :
De fait, notre statut de fonctionnaire d’État saute. Ce qui permet de faire
entrer pleinement en action la réforme de la fonction publique (de l’année
dernière), notamment sur la mobilité.
Cette redefinition se ferait par la mise en place d’une part fixe du salaire de plus en plus
faible avec un gel point d’indice deja gele jusqu’en 2022. (manifestement le gouvernement dans toutes ses projections table sur une evolution des choses jusqu’en 2025)
La part variable serait de fait realisee par la mise en place de primes. Le taux de primes des
enseignants etant de 16% dans le secondaire (mais dans lesquels sont intégrées les heures
supplémentaires, ce qui n’est pas le cas dans les autres corps de la fonction publique) et de 7% dans le primaire. Contre 30,3% de primes dans la FPE (hors enseignants) « Rapport sur l’état de la fonction publique et les rémunérations » 2018 (p.124-125)(5)
Ces primes seraient conditionnees a la mise en place de nouvelles charges de travail et en partie determinees directement par le chef d’etablissement (potentiellement issu du prive, grace a la loi Dussopt avec un recours possible aux contractuels pour des postes de direction), plus la nouvelle sanction (sans examen par la CAP) : exclusion temporaire de 3 jours decidee par les chefs d’etablissements/directeurs.
Ainsi de nouvelles primes apparaitraient :
formation obligatoire pendant 1 semaine de vacances (deja acte et mise en place a la rentree
2020-2021).
Soutien aux eleves en difficultes sur des periodes de vacances de maniere plus generalisee
qu’actuellement.
Encadrement du SNU (Service National universel, cout 1,5 a 3 milliards par an), car la prise en charge du SNU s’est faite par l’education nationale et non par les armees. Quid de l’encadrement ? (C’est vous)
Prime a la mobilite et mobilite des fonctionnaires (loi Dussopt) permettant de bouger les fonctionnaires ou l’administration en aura besoin pour raison de service. Ce qui permettra de developper une technique bien connu du neo-management pour destabiliser les equipes et eviter que ne s’installe une cooperation qui pourrait aller contre la hierarchie. Ce qui est evidemment a l’encontre de l’interet des eleves car les collegues mettent en place de fait des projets pluriannuels pour une cohorte d’eleves.
Les CAP (commissions administratives paritaires)seraient reduites a l’examen de cas
particuliers sur demande du salarie APRES la prise de decision (loi Dussopt). Empechant, de fait, le controle par les syndicats des mutations, mais egalement d’avoir un oeil sur la creation de postes a profils particuliers. Ainsi la mise en place d’un poste a profil particulier vous mettra sur un siege ejectable par la creation sur votre poste ou a contrario l’apparition d’un poste a profil particulier auquel vous correspondrez qui necessitera votre mutation ≪ pour raison de service ≫ (pleins d’idees peuvent surgir : primaire ↔ secondaire ; anciennete sur poste en zone difficile, agregation…).
Refuser plusieurs fois des postes pour raison de service etant une cause possible de licenciement pour faute grave.
Ainsi avec la mise en place d’une part variable dans nos traitements et la mobilite par creation de postes a profils particuliers, notre emploi a vie et notre liberte pedagogique viennent de disparaitre par l’apparition de la rupture conventionnelle, car l’etat employeur aura alors des possibilites par l’action sur nos salaires et l’instabilite de nos postes a nous pousser a une rupture conventionnelle a leurs conditions. Voir meme de nous pousser a la demission ou mieux pour eux a l’abandon de poste et ce lorsque nos salaires plus eleves de fin de carriere ou notre interet pour l’etat diminueront. NB : 52% des + de 58 ans sont actuellement en plein emploi.
Droits au chomage ouverts dans la contribution generale au 1er fevrier 2018. La gestion des allocations chomage pour les agents de l’Education Nationale est assuree par Pole emploi – precedemment assuree par le Ministere de l’Education Nationale. sous conditions particulieres, notamment la disparition de votre poste permet votre licenciement si votre matiere disparait (LCA, etc…) ou si par exemple vous ne correspondez plus aux nouveaux profils embauches apres reforme de la formation initiale. Des termes comme bivalence, annualisation ?… pistes envisagees dans le livre « L’école de demain » (2016) de J.-M. Blanquer (6) ou le rapport cap 22 « Service public : se réinventer pour mieux servir » (2017) (7). M.Blanquer evoquant la creation d’un nouveau corps venant petit a petit se substituer aux notres.
Il est desormais possible d’indemniser les agents lors d’une periode de chomage. Il s’agit de l’allocation d’Aide au Retour a l’Emploi (ARE).
Cette indemnite chomage concerne les contractuels de l’enseignement et intervient dans 3 situations :
La perte involontaire d’un emploi dans le cadre d’un contrat a duree determinee
Une demission
Un licenciement
Toutefois, pour beneficier de l’ARE vous devez remplir certaines conditions et justifier d’une periode minimale de travail. Toute reprise d’activite entraine l’arret des versements de l’ARE. Vous pouvez pretendre a une allocation d’ARE si vous etes fonctionnaire, contractuel en CDD, ou a la suite d’un licenciement.
Cela tombe bien, un nouveau type de contrat est apparu (le contrat de projet).
La formation initiale etant egalement remodelee par un choix en debut d’etude pour le secondaire entre le CAPES et l’agregation. La formation pour le CAPES etant maintenant constituee de 3 annees de disciplinaire (outre le fait d’un niveau disciplinaire insuffisant) suivies de 2 annees de formation ≪ pedagogique et du bon fonctionnaire ≫. Le concours etant passe a la fin des 5 annees. Les nouveaux collegues n’auront donc plus du tout le niveau disciplinaire pour passer l’agregation et en plus, si ils sont recales, n’auront d’autre choix que de devenir contractuels.
Contractualisation deja en cours a l’education nationale avec une augmentation progressive: ≪ Depuis 10 ans, la part de non-titulaires parmi les enseignants a augmente, dans le public et dans le prive sous contrat : elle est ainsi passee de 2,3 % en 2008 a 5,4 % en 2018 dans le public, et de 12,9 % a 17,8 % dans le prive sous contrat ≫ (« l’état de l’école 2019 » Depp (8) ).
Contractualisation, amenee selon les termes du rapport legislatif sur le projet de loi de modernisation de la fonction publique (M. Dussopt) a augmenter a hauteur de 40%. (9) 2eme HSA obligatoire qui grace a des heures supplementaires moins payees que des heures statutaires permet EN PLUS de fermer des postes (environ 26000 : cours des comptes).
Les premieres attaques ont lieu depuis longtemps, rappelons que le 23/12/2009, Jean-Michel Blanquer devient le DGESCO de Luc Chatel ou il est alors en charge d’elaborer et de mettre en oeuvre la politique relative aux ecoles, aux colleges ainsi qu’aux lycees generaux et professionnels.
Loi Blanquer et Loi Dussopt s’enchainent sur toute l’annee derniere pour finir en apotheose avec la greve du bac. Nous avons donc couru toute l’annee scolaire derniere, avec les AG pour aider les syndicats submerges d’informations a transmettre aux collegues et ce derriere les annonces sans cesse enchainees du gouvernement.
La reforme des lycees et du bac avec les E3C ont ensuite quasiment totalement mobilise les collegues de lycee et monopolise leur attention. La refonte de notre statut avec la reforme des retraites et la mise en place de la rupture conventionnelle ainsi que les echanges avec les syndicats sur la refondation du metier enseignant sont ainsi passes au second plan pour une grande part.
Le calendrier a ete etabli pour mettre les profs des lycees professionnels, generaux et technologiques le nez dans la refonte des programmes et du bac. Pour la deuxieme partie, destruction du statut par la mise en place de la reforme des retraites/la rupture conventionnelle/ redefinition du metier sur un calendrier qui s’etale maintenant jusqu’au mois de juin comme pour les retraites. Nous serons donc amenes a etre dans l’action au moins jusqu’a cette date. Avec un passage en force aux mois de Juillet/Aout ?
Et après ? Les transformations engagees par le gouvernement font etat d’une mise en place progressive jusqu’en 2025 alors qu’ils ne seront peut-etre plus au gouvernement. Quid ? Ontils d’ors et deja une strategie pour la suite ?
Nous perdons l’avantage des vacances, nous perdons nos retraites, nous perdons nos emplois à vie, nous perdons notre liberté pédagogique, nous serons obligés d’accepter tout projet pédagogique ou expérimentation (Loi Blanquer).
Et même si dans la loi nous serons toujours en possibilité de faire grève, qui en prendra le risque ? Comme dans le privé actuellement.
La fonction public hospitalière (78% de femme) a été mise au pas par la réquisition. Les transports ont été mis au pas par la privatisation au 1er janvier 2020. La fonction publique territoriale suit le même trajet (62% de femmes).
Nous sommes les suivants, nous enseignant.e.s (70% de femmes). « Les chiffresclés de la fonction publique 2018 » (10)
Il n’y a plus d’équité pour les élèves (Bac Blanquer), l’école française est l’une des plus inégalitaire socialement (rapport PISA – OCDE) (11), création d’établissements publics internationaux (EPLI) non ouverts à tous les élèves (Loi Blanquer). La disparition des comités de suivi et de statistiques, la transformation de la formation initiale : instituts nationaux du professorat et de l’éducation (INSPE) (loi Blanquer) qui auront forcément une incidence sur le niveau d’enseignement dévoué aux établissements publiques, de même que la contractualisation.
Selon l’OCDE « regards sur l’éducation 2019 » (12) la situation de l’école française et des enseignants français n’a rien d’enviable. La privatisation de l’école arrive à marche forcée sauf que vous n’aurez pas les salaires nécessaires, ni les retraites pour vous payer vos soins, les études de vos enfants et petits enfants. La justice est également mise à mal pour défendre vos droits.
Prenons dès maintenant de l’avance et ne soyons plus suiveur et relayeurs des décisions gouvernementales. C’est à mon sens ce à quoi tendre l’action unie et conjointe de la coordination nationale de l’éducation regroupant les AG et de l’intersyndicale la plus large possible. Imposons nos vues par une action forte conjointe et coordonnée qui sera activement préparée à une date précise suffisamment éloignée dans le temps pour organiser nos forces/coordonner nos actions et informer très massivement les collègues sur les enjeux de cette bataille.
(1) https://www.legifrance.gouv.fr/eli/loi/2019/7/26/MENX1828765L/jo/texte
(2) https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000038889182&categorieLien=id
(3) https://www.fonction-publique.gouv.fr/pourquoi-statut-ciment-juridique-a-lepreuve-temps
le-nouveau-systeme-universel-20200129
(6) http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2016/11/07112016Article636140851780439010.aspx
(7) https://www.modernisation.gouv.fr/action-publique-2022/comprendre/rapport-cap22
(8) https://cache.media.education.gouv.fr/file/etat29/02/2/depp-2019-ee_1191022.pdf
(9) https://www.senat.fr/rap/l06-113/l06-1132.html
(10) https://www.fonction-publique.gouv.fr/files/files/statistiques/chiffres_cles/pdf/Depliant_CC2018.pdf
(11) https://www.oecd.org/pisa/PISA%202018%20Insights%20and%20Interpretations%20FINAL%20PDF.pdf
(12) https://read.oecd-ilibrary.org/education/regards-sur-l-education-2019_6