Après l’espoir, la désillusion. La France entière a été émue par les reportages et les articles sur les “sacrifiés de Toury”. Mais la sucrerie va bel et bien fermer.
La volonté de Didier Guillaume, ministre de l’Agriculture, annoncée, il y a quelques jours dans nos colonnes, de sauver la sucrerie de Toury et éviter des licenciements, n’a pas fait le poids devant la volonté du groupe Cristal Union de fermer le site de la sucrerie de Toury.
La réunion de la dernière chance, voulue par le ministre dans ses bureaux parisiens, mardi, n’a rien changé au destin des soixante derniers salariés scellé, depuis plusieurs mois, malgré l’émotion éprouvée nationalement par leur engagement à produire de l’alcool pour du gel hydroalcoolique, au cœur de la crise sanitaire du coronavirus.
« J’ai participé à la réunion avec Jean-Louis Baudron, président de la communauté de communes Cœur de Beauce, et les représentants de Cristal Union. Ils nous ont annoncé qu’ils ne veulent pas vendre la distillerie au groupe coopératif Tereos. Ils insistent sur le fait de démanteler la sucrerie puisqu’ils ont un projet dont ils ont donné des détails au journal Le Figaro, de ce mercredi. Vis-à-vis des acteurs du territoire eurélien, Cristal Union a fait preuve d’une absence totale de transparence. La seule certitude, c’est qu’ils ne veulent pas vendre le site à un concurrent. Ainsi, ils disent tout et son contraire. Dans le journal, Cristal Union raconte qu’elle est en discussions multiples et sérieuses pour des rapprochements avec d’autres groupes et, dans la réalité, elle n’effectue aucun engagement positif en direction de la sucrerie de Toury », confie, avec beaucoup de colère, Philippe Vigier, député de la quatrième circonscription d’Eure-et-Loir.
En attendant, les soixante salariés restants, sur les cent vingt-huit concernés par cette fermeture, ont effectué, ce mercredi, leur dernière journée de travail sur le site de Toury.
« La production vient de s’arrêter définitivement ce soir. Sur la soixantaine de salariés, l’entreprise va en licencier une vingtaine dès la semaine prochaine. Le reste des licenciements sera étalé dans le temps, jusqu’à septembre-octobre, pour écouler le reste de la production. Ainsi, le groupe Cristal Union vide les stocks de la sucrerie de Toury pour se remplir les poches », lance amèrement le délégué CGT du site, Frédéric Rebyffé.
Ainsi, après 145 ans d’existence, au cœur de la Beauce, entourée des champs de betteraves, la sucrerie de Toury vient d’être sacrifiée sur l’autel d’une stratégie de développement sur un marché mondialisé.
Si la direction n’a pas souhaité s’exprimer officiellement sur ce dossier, il n’en demeure pas moins que le groupe pense avoir tout fait dans le cadre de la loi Florange qui instaure, pour certaines entreprises, une obligation de rechercher un repreneur dans un certain délai.
Selon nos informations, la période de recherche de repreneur a été prolongée une fois de six mois, en vain.
Au même moment, le député Philippe Vigier explique que la « volonté de Cristal Union était de ne pas vendre à Tereos, un groupe coopératif concurrent ».
Cristal Union, qui vient d’annoncer une perte de 89 millions d’euros pour son exercice clôturé en janvier dernier, avait annoncé à la presse que « 61 de ces 89 millions ont été provisionnés pour les plans sociaux des sites destinés à la fermeture ».
Le vieux site de Toury et sa longue histoire industrielle tournent la page agroalimentaire beauceronne mais pour « une réorganisation stratégique capable de renforcer l’outil industriel du groupe dans sa bataille internationale pour affronter la baisse du prix du sucre ».
Ahmed Taghza République du Centre