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En hommage à Pierre Ghenassia, lycéen communiste juif algérien, mort le 22 février 1957 pour l’indépendance de son pays

A l’heure où les conservateurs libéraux font du « choc des civilisations », le cadre de compréhension de l’époque contemporaine, la figure d’un jeune comme Pierre Ghenassia mérite de ne pas être oubliée.

Mort au champ d’honneur le 22 février 1957

Ancien élève du lycée Bugeaud (aujourd’hui lycée Emir Abdelkader), Pierre Ghenassia n’a pas encore 17 ans quand il rejoint, en mai 1956, l’Armée de libération nationale (ALN) dans la région de Ténès, sa ville natale.

Il tombera au champ d’honneur le 22 février 1957, dans le djebel Béni Salah, au sud-ouest de Chréa, dans l’Atlas blidéen, au cours du bombardement par l’armée française d’une infirmerie de l’ALN au douar Béni Annès, sur la rive droite de oued Merdja. Avant de monter au maquis, il a fait d’abord partie du réseau « La Voix du soldat » dirigé par Lucien Hanoun, professeur de lettres, membre du Parti communiste algérien (PCA).

Pierre Ghenassia était en contact aussi avec Raymond Hannon qu’il a connu au sein de l’Union de la jeunesse démocratique algérienne (UJDA). Raymond Hannon, qui connaît le chef du maquis de Miliana, devait être transféré vers ce maquis pour être secrétaire administratif du chef régional, mais il est arrêté par la police. A la suite de cette arrestation, Pierre Ghenassia entre en clandestinité, puis rejoint le maquis de Ténès, organisé par Rabah Benhamou, membre du PCA.

Pierre Ghenassia, descendant d’une famille juive de Tétouan (son arrière-grand-père était rabbin) est né le 24 juillet à Ténès. Son père, Roger Ghenassia, était fonctionnaire de l’administration des impôts et sa mère, Nedjma Bensaïd, propriétaire d’une bijouterie à Ténès. Ils avaient pour voisin, le Dr Jean Massebœuf qui a été pour beaucoup dans la constitution du maquis de Ténès. Arrêté pour ses activités, le Dr Massebœuf avait été condamné aux travaux forcés par le tribunal militaire français.

Dans son livre-témoignage On nous appelait fellaghas, le commandant Azzedine parle en termes émouvants de Pierre Ghenassia. « Parmi eux (les hommes en blanc), l’une des figures les plus attachantes était celle de notre infirmier zonal, Hadj. Nous l’appelions ainsi, mais son vrai nom était Ghenassia. Il était israélite et parlait très bien l’arabe. Pour tous ceux qui tiennent comme un fait établi le prétendu antagonisme de nos origines religieuses, je voudrais qu’on le sache : Hadj est mort, refusant d’abandonner ses blessés. »

Pierre Ghenassia est mort pour l’indépendance de l’Algérie, mêlant son sang à celui d’autres jeunes lycéens de son âge, tombés eux aussi au champ d’honneur, comme Nour Eddine Bencherchali de Blida. Une rue de Ténès, sa ville natale, a porté le nom de Pierre Ghenassia, au lendemain de l’indépendance, mais des esprits malintentionnés, installés en 1990 à l’APC de Ténès, effacèrent son nom de la plaque et le remplacèrent – cyniquement – par El Qods. Des anciens de l’ALN en furent offusqués.

Mohamed Rebah , El Watan,

Jusqu’à  1990, une  rue  de  Ténès  portait  le  nom de  Pierre  Ghenassia, un enfant juif de la ville, tombé au champ d’honneur pour la libération de l’Algérie. Les élus islamistes installés à l’APC en 1990 rebaptisèrent la rue au nom d’El-Qods.

Il est vrai que l’inculture et l’ignorance crasse font commettre les pires choses, comme d’ailleurs la tentative de débaptisation plus récente d’une rue qui portait le nom de Fernand Iveton à Oran, avant que des patriotes n’interviennent pour rétablir la place du guillotiné, mort pour l’Algérie le 11 février 1957.

Pierre Ghenassia tombait au champ d’honneur à l’âge de 17 ans, le 22 février 1957,  lors  d’un  accrochage  avec  l’armée  française  dans  la  Wilaya  4 historique. Né  à  Ténès  en  1939  dans  une  famille  juive  de  tradition anticolonialiste, il l’était lui-même profondément dès son jeune âge.

Proche du Parti communiste algérien, il fréquentait les nationalistes du FLN et baignait  dans  une  ambiance  familiale  engagée  pour  l’indépendance (son cousin Jean-Pierre Saïd, sa  tante  Mireille Saïd…).  Dès  son déclenchement, Pierre Ghenassia adhérait à la Révolution de Novembre 1954.

En 1956, il rejoint l’ALN dans la Wilaya 4 historique, sous les ordres du Commandant Azzedine. Sous le nom de guerre de Hadj, il était infirmier et soignait les blessés de l’ALN. “Hadj est mort, refusant d’abandonner ses blessés.

C’était un frère et nous l’avons pleuré… Il est mort à Tiberguent en défendant une infirmerie et les blessés dont il avait la responsabilité”, écrit le Commandant Azzedine, qui ajoute : “L’une des figures les plus attachantes fut celle de notre infirmier zonal, Hadj. Nous l’appelions ainsi, mais son vrai nom était Ghenassia. Il était israélite, parlait très bien l’arabe. Pour tous ceux qui tiennent comme un fait établi le prétendu antagonisme de nos origines religieuses, je voudrais qu’on le sache : Hadj est mort les armes à la main, pour l’Algérie.”

Dans une lettre à ses parents écrite au maquis, “Pierre, dit Hadj” (c’est ainsi qu’il l’a signée), dit : “Je milite depuis au milieu de milliers de jeunes qui, comme moi, ont rejoint le maquis et qui, dans un magnifique élan d’enthousiasme, tendent tout leur être vers la réalisation de leur idéal.”

Il embrasse ses parents et termine sa lettre par un “à bientôt dans une Algérie libre et indépendante”. Durant la guerre de Libération nationale, le FLN avait appelé les Algériens “juifs et européens” à le rejoindre, en leur assurant que “son  vœu  est  celui  d’une  Algérie  multiethnique, multiconfessionnelle… où toutes les communautés seront respectées…”.

La direction de la Révolution n’a pas cessé de rappeler  que “l’Algérie est le patrimoine de tous… L’Algérie aux Algériens, à tous les Algériens, quelle que soit leur origine. Cette formule n’est pas une fiction. Elle traduit une réalité vivante, basée sur une vie commune”.

Cette  démarche  était  en  symbiose  avec  les  convictions  de  beaucoup d’hommes et de femmes, juifs et européens, essentiellement sympathisants ou membres du PCA, qui se sont engagés dans la lutte anticolonialiste. Si l’on connaît mieux Frantz Fanon, Maurice Audin ou Gisèle Halimi, d’autres noms sont inconnus du public algérien.

Pourtant, ces hommes et ces femmes se sont battus pour l’indépendance de l’Algérie  qu’ils  considéraient  comme  leur  pays.  Si, durant  la  guerre  de Libération,  les  organisations  juives  “officielles”  choisissent  la  neutralité, beaucoup de juifs français refusent de se taire et vont jusqu’à risquer leur vie pour s’opposer à la torture.

“Ils jouent un rôle de premier plan dans la  divulgation auprès de l’opinion des actes de violence révoltants commis par l’État français contre les insurgés et figurent, aux côtés de chrétiens, de musulmans et de libres-penseurs, en tête du mouvement contre la torture en France”.

D’autres juifs se sont résolument engagés dans le combat libérateur, issus pour la plupart du PCA. À sa demande, ils  ont, comme  d’autres  militants, rejoint individuellement le FLN-ALN. Ténès gagnerait à honorer la mémoire du Chahid Pierre Ghenassia en redonnant son nom à un espace public de la ville.

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