Le Parti communiste Français s’apprête à lancer une campagne en faveur de la tenue d’un référendum sur les retraites. Objectif : obliger le gouvernement à débattre publiquement de son projet de réforme, gelé pendant six mois.
Le Parti communiste veut décrocher un référendum sur les retraites. Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, a préparé une motion référendaire, que 58 députés déposeront à l’Assemblée à l’ouverture des débats, pour gripper la machine. Le parti dévoilera la campagne de communication qu’il a préparée pour appuyer son action, ce lundi 5 décembre, à Morlaix.
Comment le Parti communiste peut-il obtenir l’organisation d’un référendum sur la réforme des retraites ?
Par une campagne nationale, que je lancerai ce lundi soir, à Morlaix (Finistère). Nous avons préparé plus de 200 000 affiches, un tract pédagogique, un slogan – « De bons salaires, c’est une bonne retraite » – et une pétition en ligne (sur le site unebonnetraite.fr). Nous doublerons cela en déposant une motion référendaire au Parlement.
Une motion référendaire ? Pas un référendum d’initiative partagée ?
On peut déclencher un référendum plus facilement en le faisant directement par l’Assemblée et le Sénat. Il suffit que 58 députés signent la motion. S’ils sont tous présents dans l’hémicycle à l’ouverture de la séance, elle doit être soumise aux voix. Adoptée à la majorité simple, elle entraîne la suspension des débats. Elle sera transmise au Sénat, qui aura 30 jours pour l’examiner et se prononcer.
« Mieux vaut un grand débat plutôt qu’un blocage du pays ! »
Le groupe communiste compte moins de 58 députés. Votre motion référendaire sera portée par la Nupes ?
L’ensemble des forces de gauche soutient notre démarche.
Mais vous n’aurez pas de majorité au Sénat ?
Faut-il aligner le mode de calcul des retraites des fonctionnaires sur celui du privé ?
Et pourquoi pas ? Accepter un référendum, ça veut dire six mois de réunions publiques, des passages dans les médias, une grande campagne de confrontation d’idées… Ça ferait du bien à la démocratie. Mieux vaut ça plutôt qu’un blocage du pays, avec manifs, grèves et compagnies. N’ayons pas peur du débat ! Moi je souhaite en organiser dans les usines, les ateliers, les bureaux. Les parlementaires communistes se rendront disponibles pour rencontrer les salariés, et j’invite les chefs d’entreprise à créer des espaces de discussion pour ça. Nous sommes leur meilleur allié.
Le PCF meilleur allié des chefs d’entreprise ?
La réforme envisagée par le gouvernement va demander aux Français de travailler plus longtemps, y compris pour ceux qui ont une carrière longue. Une partie des chefs d’entreprise ne souhaitent pas cette réforme, qui va créer plus de chaos qu’autre chose. Chercher à l’imposer coûte que coûte, sans un vrai débat, c’est prendre le risque de soulever un tsunami de colère et de mécontentement. Nous avons besoin d’unité. D’être soudés face à la crise. De solutions. Pas d’une confrontation qui mette le pays à feu et à sang.
« Il suffirait de créer des emplois pour combler le déficit »
Quelles sont vos positions ?
Nous montrerons qu’il est possible d’améliorer la retraite des Français sans augmenter l’âge de départ. Il y a juste besoin de faire travailler plus de monde. Le Conseil d’orientation des retraites dit que le régime sera en déficit de 8 à 10 milliards en 2030, mais qu’il reviendra à l’équilibre en 2040. C’est une somme importante, mais sur un budget global de 350 milliards, avec les réserves des complémentaires qui s’élèvent à 130 milliards, cela reste modeste. Il suffirait de créer des emplois pour combler le déficit annoncé.
Ce n’est pas ce que fait le gouvernement ?
Ce sont des emplois qui génèrent des cotisations sociales dont nous avons besoin. Du travail. De l’emploi. Pas des primes. Pas de l’intéressement. Pas du dividende salarié. Aujourd’hui, un senior sur deux, dans la tranche des 50-64 ans, est au chômage. Si 10 % d’entre eux accèdent au travail, c’est réglé.
Que demandez-vous concernant les salaires ?
Le Smic à 1 600 € net et une indexation de l’ensemble des salaires sur l’inflation. La retraite ne devrait pas être inférieure au Smic pour une carrière complète, et de pas moins de 85 % du Smic pour une carrière hachée. La création d’un revenu étudiant permettrait de compter la période d’études dans les années de cotisation, avec la garantie d’un départ à 60 ans pour tout le monde.
« Le gouvernement ne peut pas passer en force »
La Nupes partage votre analyse ?
Je formule le souhait que l’ensemble des forces de gauche présente un projet commun. Je sais, pour en avoir parlé avec les autres chefs de parti, que nous sommes tous pour une meilleure prise en compte des carrières longues, de la pénibilité au travail, des inégalités hommes femmes à corriger.
Quels sont vos points de désaccord ?
Nous avons une nuance sur la durée des cotisations. Pour nous c’est 37,5 ans et non 40. Après, c’est surtout une question de calendrier et de tempo.
Quel est votre objectif concernant la pétition lancée sur unebonneretraite.fr ?
Je souhaite que tous les Français s’en mêlent, parce que nous sommes tous concernés. Des centaines de milliers de signatures doivent convaincre le gouvernement qu’il ne peut pas passer en force. C’est ce que nous avions obtenu avec la pétition pour le référendum contre la privatisation d’Aéroports de Paris. L’ampleur de la mobilisation avait entraîné le retrait du projet.
Ouest-France